Vous reprendrez bien du vitriol ?

Avec « Plans rapprochés », Guy Bedos dessine une série de portraits de personnalités. Entre amitié et bons coups de griffes.

Jean-Claude Renard  • 17 mars 2011 abonné·es

C’est peu dire qu’il a initié le genre. Ça remet loin, en 1975. La revue de presse, sur scène, entre deux ou trois sketches, puisant dans l’actualité, dans l’information, d’une citation à l’autre, égrenant ses commentaires comme des fiches ­cuisine. Guy Bedos a fait école. À côté de Stéphane Guillon et de Didier Porte, Christophe Alévêque en est un autre bel exemple, articulant même, récemment au ­théâtre du Rond-Point, tout un spectacle autour d’une revue de presse. Et si Bedos a fait de cet exercice une marque de fabrique, vitriolante et drôle à la fois, lucide et cinglante, c’est qu’il affectionne tout particulièrement les médias. Inconditionnel et accro.

Le comédien, trublion humoriste publie aujourd’hui un nouvel opus. Non pas une fiction, comme c’était le cas avec le Jour et l’heure (en 2008), mais une galerie de portraits, de proches et moins proches, de personnalités appréciées ou peu goûtées. Passons sur Aragon, Simone Signoret, Pierre Desproges, Barbara, Coluche, Sophie Daumier, Mastroianni, ce cimetière d’amicalités qui hante son existence. ­Passons sur Kouchner, qui, « à son ­honneur, a préféré son portefeuille » , sur Michel Charasse, « populiste » qu’il verrait bien « au ministère de l’Immigration et de l’Intégration nationale, à la place du sinistre ­Besson » , sur Jospin, « déjà dans le ­posthume » , ou sur Henri Guaino, « le nègre le mieux payé du pays » .

Dans ces Plans rapprochés, beaucoup sont dans les médias. Ainsi Edwy Plenel, que Bedos « aime mieux sous la droite que sous la gauche. Comme créateur de Mediapart plutôt qu’en directeur du Monde sous Alain Minc » , soulignant au passage que « dans l’incroyable sitcom Woerth-Bettencourt et face à une presse papier majoritairement berlusco­nisée par Sarkozy, Mediapart et quelques rares publications, dont le Canard, Marianne, Libération, Politis et l’Humanité, auront été bien réconfortants » .

Dans les bons points, Plantu est salué, Frédéric Bonnaud, cité. Mais Bedos ne fait pas que dans l’éloge. Si Philippe Val est rincé, ayant viré ses « filleuls » , Stéphane Guillon et Didier Porte, considéré en « parvenu » , Éric Zemmour est une cible privilégiée, à cause duquel il s’interdit maintenant d’aller sur le plateau d’ « On n’est pas couché » de Laurent Ruquier. Pour une raison simple : « Le fait est d’abord que Zemmour est raciste, et je m’étonne qu’on s’en étonne. » Agacé, Bedos, de subir l’omniprésence médiatique du journaliste du Figaro.

Brossant le portrait d’une vingtaine de personnalités, de la scène, du cinéma, de la politique et des médias, rédigeant son rapport à l’autre, au fil de ses souvenirs, des colères, des petits plaisirs, Guy Bedos en dit ainsi autant sur lui-même que sur les autres. Parfois pas mécontent de lui, parfois roublard, nostalgique, railleur, souvent drôle, toujours engagé. À la Ligue des droits de l’homme ou auprès de sans-abri.

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