Christian Estrosi s’oppose in-extremis à l’achat d’une salle de prière musulmane

Le maire de Nice a fait jouer son droit de préemption pour acquérir une salle de prière qu’une association musulmane voulait acheter. La mairie souhaite *« mettre de l’ordre »* dans le centre ancien et interdire les « prières de rue ».

Erwan Manac'h  • 17 juin 2011
Partager :
Christian Estrosi s’oppose in-extremis à l’achat d’une salle de prière musulmane
© Photo : [Capture d'écran](http://www.facebook.com/media/set/?set=a.102625676441499.4526.102622739775126)

Rue de Suisse, dans le centre ancien de la ville de Nice, une salle sert de lieu de culte depuis 11 ans. Le 28 mars, l’association cultuelle Al Baraka, qui l’occupe, signe un compromis de vente avec le propriétaire des lieux pour en faire l’acquisition. La somme nécessaire, 161 000 euros, est sur le point d’être réunie pour finaliser l’achat. Mais un jour avant le terme du délai légal de préemption, le maire UMP de la ville, Christian Estrosi, s’interpose en faisant valoir son droit pour acquérir le local.

La mairie dit vouloir « mettre de l’ordre » dans le quartier, pour que « chacun puisse pratiquer son culte dans le respect de la loi, sans débordement » , d’après Auguste Vérola, adjoint au commerce et aux cultes interrogé par la presse locale. Car ce sont les « prières de rue » qui posent problème à la municipalité. Faute de place, certains fidèles prient sur le trottoir le vendredi. En mars, un « apéro porchetta-rosé » avait été organisé devant la salle par des Identitaires qui entendaient dénoncer « l’islamisation » de ce quartier du centre de la ville.

En préemptant la salle, qui sera louée à l’association pour continuer d’y accueillir les fidèles, la ville s’assure de pouvoir imposer un cahier des charges à Al Baraka pour y interdire les « prières de rues ». Face au manque de place dans les lieux de culte, que la communauté musulmane dénonce, la municipalité dit avoir mis en place des minibus en direction des mosquées, à l’extérieur du centre-ville.

« Le maire Christian Estrosi affiche clairement que le culte musulman ne peut être chez lui dans la ville et encore moins dans le centre » , estime Abderrazak Fetnan, conseiller municipal d’opposition (liste Changer d’Ère) cité par Nice Matin. L’association Al Baraka dénonce, elle, dans un communiqué, « un acte islamophobe et raciste » qui les a pris par surprise, au vu des discussions qui « avaient ramené de la sérénité et instauré la confiance » entre les deux parties. « L’histoire se répète, avec le même harcèlement à l’encontre de l’unique salle de prière musulmane dans le centre-ville » , dénonce dans les colonnes de la presse locale Hamid Soussany, vice président de l’association. Al Baraka compte saisir le tribunal administratif et la préfecture des Alpes-Maritimes pour contester la décision de la mairie.

Société
Temps de lecture : 2 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Tour de France : Franck Ferrand, commentateur réac’ toujours en selle
Médias 11 juillet 2025

Tour de France : Franck Ferrand, commentateur réac’ toujours en selle

Cette année encore, France Télévisions a reconduit Franck Ferrand aux commentaires en charge du patrimoine lors du Tour de France. L’historien, très contesté, fan de Zemmour et de thèses révisionnistes, n’hésite pas, insidieusement, à faire passer ses idées.
Par Pierre Jequier-Zalc
La CGT et le Tour de France : quand sport et luttes se marient bien
Luttes 11 juillet 2025

La CGT et le Tour de France : quand sport et luttes se marient bien

Si le Tour de France est avant tout un événement sportif, il permet aussi à des luttes sociales et politiques de mettre en avant leur combat. Comme lundi dernier, à Dunkerque pour sauver les emplois d’ArcelorMittal.
Par Pierre Jequier-Zalc
« Ils parlent d’échange de migrants comme si les personnes étaient des objets »
Entretien 11 juillet 2025 abonné·es

« Ils parlent d’échange de migrants comme si les personnes étaient des objets »

Alors qu’un accord d’échange des personnes exilées a été trouvé entre la France et le Royaume-Uni, Amélie Moyart, d’Utopia 56, revient sur les politiques répressives à la frontière et le drame qui a conduit l’association à porter plainte contre X pour homicide involontaire.
Par Élise Leclercq
Terrorisme d’extrême droite : derrière le site d’AFO, Alain Angelini, soutenu par le RN en 2020
Enquête 10 juillet 2025 abonné·es

Terrorisme d’extrême droite : derrière le site d’AFO, Alain Angelini, soutenu par le RN en 2020

L’homme, alias Napoléon de Guerlasse, est l’administrateur du site Guerre de France, qui servait au recrutement du groupe jugé pour association de malfaiteurs terroriste. Militant d’extrême droite soutenu par le parti lepéniste aux municipales de 2020, son absence au procès interroge.
Par Pauline Migevant