Jazz et Gnawas

Un trio inattendu mêle pianisme moderne et sources marocaines.

Denis Constant-Martin  • 30 juin 2011 abonné·es

Un pianiste allemand, vétéran de la musique improvisée européenne, un musicien marocain, virtuose du oud et imprégné de musique gnawa, un percussionniste espagnol d’une finesse et d’une musicalité exceptionnelles : la réunion d’un tel trio n’avait rien d’inéluctable. Mais, en quelques années, il a atteint un équilibre et une cohésion qui donnent à la musique que font ensemble Joachim Kühn, Majid Bekkas et Ramon Lopez des nuances changeantes en même temps qu’une belle homogénéité.

Sur la base de modes qui peuvent venir du jazz ou de la musique des Gnawas, ils passent sans solution de continuité d’un idiome dérivé du jazz moderne, voire libre, des années 1960-1970 à un langage plus imprégné de traditions maghrébines. Le guembri (luth à trois cordes doté d’une caisse de résonance parallélépipédique) de Majid Bekkas accompagne à la manière d’une basse, mais en soliste émerge comme un violoncelle en pizzicato.

Joachim Kühn, qui, même dans ses périodes les plus aventureuses, a toujours gardé un sens puissant du lyrisme, évolue, sur cette assise, entre un jeu mélodique presque romantique et un pianisme moderne exubérant. Ramon Lopez ne se contente pas de pousser les feux rythmiques, il met dans la pulsation qu’il produit des couleurs capables à la fois de souder et de donner de la profondeur. Plus qu’une synthèse, la musique de ce trio, qu’on peut entendre à Vitrolles le 2 juillet, est une véritable œuvre de création qui transcende les inspirations premières pour proposer un univers sonore mobile et fascinant.

Culture
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