Casser la spéculation au plus vite

Seules une forte volonté politique et une intervention de la Banque centrale européenne pourraient arrêter les mouvements spéculatifs sur la dette italienne.

Thierry Brun  • 21 juillet 2011 abonné·es

Lundi 11 juillet, les Bourses européennes chutent. Les salles de marchés bruissent de la crainte d’une contagion de la crise grecque à d’autres pays de la zone euro, en particulier l’Italie, qui tarde à mettre en place un plan d’austérité. En l’espace de 24 heures, le Trésor italien a dû promettre de verser des taux d’intérêt très élevés, qui ont flambé le 12 juillet lors de sa dernière émission d’emprunt, pour un montant de 6,75 milliards d’euros. L’affaire est juteuse pour les gros acteurs du marché, mais avec un risque majeur. « Si jamais les taux d’intérêt continuent de grimper, tout le monde va revoir à la hausse ses anticipations sur les charges de la dette italienne et conclure que la dette publique est insoutenable. Nous sommes dans une problématique presque autoréalisatrice : une crise de défiance va générer l’insoutenabilité des charges de la dette », explique un spécialiste des marchés de la dette souveraine, économiste dans une grande banque [^2]
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« On entre dans un phénomène de pure contagion. Si cela continue, on va droit vers une catastrophe financière », ajoute ce spécialiste, qui accuse les hedge funds (fonds d’investissement) et les traders d’être à l’origine de ce vaste mouvement spéculatif.
 « La spéculation qu’on avait sur le marché des changes s’est déplacée sur le marché obligataire et les taux d’intérêt des emprunts d’État. Cette spéculation se fait à partir des CDS   [^3]. Or, un “événement de crédit”, par exemple un rééchelonnement de la dette d’un État, pourrait déclencher les CDS [c’est-à-dire le versement de compensations] et générer cette crise financière majeure. » Il faut donc « casser au plus vite la spéculation par une intervention très forte de la Banque centrale européenne, et il faut d’urgence arrêter la cacophonie politique ». Pour cet économiste, « les gouvernements ont crû acheter du temps en pensant qu’il suffisait de voter la cinquième tranche du plan d’aide au Fonds monétaire international et d’attendre septembre. Or les marchés n’attendront pas ». Voilà qui promet des lendemains très spéculatifs…


[^2]: Interrogée par Politis, cette personne a requis l’anonymat.

[^3]: Les Credit Default Swaps (CDS) sont des contrats d’assurance couvrant, par exemple, un incident de paiement sur la dette d’un État.

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