Faire son pain à la main

Patrick Piro  • 28 juillet 2011 abonné·es

Que faire ?

La pupille et la papille de l’initié, quand la tranche jaillit du grille-pain : « Ah, Leonardo, toi aussi tu fais ton pain à la maison ? T’as la BredMyself ? » Luc encense sa machine à pain et son rice-cooker. Ben non, je fais tout à la main. Ça commence comme toi : farine, sel, levain, eau. Et là, bifurcation, les paumes et les avant-bras prennent le relais : je pétris. Jusqu’à ce que la pâte devienne élastique. Après, je passe le flambeau aux ferments pour la levée. Durée ductile aussi : l’alchimie dépend de la température, de la vigueur du levain, de la qualité de la farine – j’évalue à l’œil, c’est mon programmateur. Puis pétrir à nouveau, quelques minutes, pour faire la boule et l’abandonner derechef aux micro-organismes (fermentation !). Quand elle a bien gonflé, j’enfourne (après préchauffage). « Temps de cuisson ? » Dépend du four, du poids du pain. De l’ordre de trente minutes la livre. Je vais parfois jusqu’à trois kilos. On peut même couper le four à mi-cuisson, ça économise de l’énergie. « Au fait, le levain… Tu voulais dire “levure de boulanger” ? » Non, Lucky, ça aussi tu peux le faire à la main : la première fois, un peu de farine et d’eau dans un bol, on laisse fermenter trois jours à température ambiante. Puis, après le second pétrissage, tu prélèveras une mandarine de pâte qui servira à ensemencer la prochaine fournée. Ça se propage de pain en pain, ad libitum .

Pourquoi ?

« Mais Leo, tu y passes la journée ! » Trois quarts d’heure cumulés au total. Ce n’est pas pour gagner du temps. Je pourrais te convaincre que c’est économe, écolo, sain : c’est surtout du pur plaisir. La fermentation apprivoisée, les consistances complices, la cuisson anxieuse, l’appart’ embaumé, le petit mené au bout – et partagé. C’est la délectation de l’autonomie intégrale. Même pour les quantités, je fais au pif, la main et l’œil savent.

Et puis il y a le  goût incomparable de la tartine : la fermentation au levain développe beaucoup plus de saveurs qu’une simple levure, spécialisée dans la gonflette. Mon moment perso : le premier pétrissage, quand la gadoue hétérogène prend corps plastique. Attention, s’arrêter avant l’apparition de vergetures (c’est le nom) à la surface de la pâte, c’est que les fibres commencent à se casser.

Comment ?

  • Au début, consultez quelques lignes – proportions, durées, cuisson –
    pour éviter les déconvenues. L’aisance vient vite. Le site www.cuisine-facile.com
    est très pédagogue (pas obligé de tout de faire à l’identique).

  • L’eau : filtrée si elle vient du robinet, ou au repos une heure pour éliminer le chlore
    résiduel (gênant pour le ferment).

  • La farine de blé est la reine de la panification. Mais on peut la couper avec une infinité d’autres : épeautre, seigle, maïs, châtaigne, pois chiche, etc. ; ajoutez des graines, des fruits secs, de l’huile, dérapez vers la fougasse, la brioche…

Le geste utile
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