Les primeurs dans les choux

Les producteurs de fruits et légumes se plaignent de la concurrence étrangère. En réalité, les surfaces cultivées ne cessent de se réduire en France.

Claude-Marie Vadrot  • 8 septembre 2011 abonné·es

Bruno Le Maire court après les « crises agricoles » et promet de résoudre celle que connaissent les producteurs de fruits et légumes. Le ministre de l’Agriculture a annoncé dans un premier temps plusieurs millions d’euros d’aide, sous forme d’allégements de charges et de reports d’intérêts d’emprunt. Et il s’est risqué à promettre pour le 7 septembre un plan de sortie de crise aux producteurs, qui se disent exsangues face à la concurrence de pays comme l’Espagne ou l’Italie. Une crise qui n’est pas près de s’arrêter tant le poids des délocalisations de production organisées par de grandes coopératives et les efforts de la grande distribution « pour gagner plus » pèsent sur ce secteur.


Le ministre de l’Agriculture a sans doute oublié que la France est de moins en moins un « pays agricole » et que des centaines de milliers d’hectares sont en jachère ou abandonnés. En clair, l’argument de la concurrence de produits venus d’ailleurs à bas prix est souvent fallacieux. Ainsi, pour la pêche et la nectarine, dont la mévente a alimenté la chronique estivale, la production française est en chute libre : les estimations du ministère de l’Agriculture sont de 319 000 tonnes pour 2011. Loin du chiffre de la consommation, qui tourne autour de 550 000 tonnes.

Les importations en provenance de l’Union européenne ont été, en 2010, de 221 076 tonnes, dont 105 000 d’Espagne. Tonnage auquel il faut ajouter 115 754 tonnes en provenance « du reste du monde », c’est-à-dire de très loin, y compris de Chine ou d’Égypte, par exemple. Au cours des cinq dernières années, la surface française plantée en pêchers, en nectarines et en brugnons a diminué de 11 %, et ce mouvement continue. Conséquence : la production française est déclinante et ne peut suffire à la demande, qu’il s’agisse de fruits et de légumes frais ou à mettre en conserve.

La « crise » de la tomate constatée au cours du mois de juillet relève de la même aberration du système de production et de distribution, puisque en 2010 les importations de la France en provenance des pays de l’Union européenne ont été de 219 000 tonnes, dont 130 000 provenant d’Espagne. La France ne produit que 5 % de sa consommation, qu’il s’agisse du frais ou de la conserve ! En 2010, la production française de fraises (48 000 tonnes pour une consommation de 120 000 tonnes par an) n’a représenté que 4 % de celle de l’Union européenne.


Et la production française de pommes est tombée (tous usages confondus) à 1 750 000 tonnes, le verger français ayant été réduit de 8 % au cours des cinq dernières années… Conclusion : Bruno Le Maire devrait revoir sa copie en ce qui concerne la production française de fruits et de légumes…

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