Scepticisme en Cisjordanie
Malgré une apparence de consensus, l’initiative de l’Autorité palestinienne sème le doute dans une population tant éprouvée.
dans l’hebdo N° 1168 Acheter ce numéro
«S ’il n’y a pas de chaise pour la Palestine aux Nations unies, prenons une chaise en plastique. Ou une chaise longue. Parce que nous devons nous asseoir à plusieurs. » Mustafa raconte des blagues d’actualité sur une terrasse qui surplombe les ruelles du camp de réfugiés d’Al Azzeh, à Bethléem. Entre les murs de béton, les enfants profitent de leurs derniers jours de vacances. Dans quelques jours, ce sera la rentrée scolaire. Dans quelques jours, ce sera aussi l’initiative de septembre. Un pas historique, si l’on en croit les discours et l’agitation qui s’est emparée des officiels palestiniens à Ramallah.
Au cours de la 66e session de l’Assemblée générale des Nations unies, le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, présentera la demande de pleine adhésion de l’État de Palestine. Face au statu quo imposé par Israël sur le processus de paix, la Palestine espère ainsi modifier son statut légal et, peut-être, infléchir le cours de l’histoire. « Une reconnaissance internationale de notre État, sur la base des frontières de 1967, [en] fera un État sous occupation. Cela va changer la formule juridique de notre situation », a déclaré Mahmoud Abbas.
Installé sur un tabouret en plastique, Mustafa sirote son café et, comme la plupart des Palestiniens, s’interroge sur les manifestations possibles de ce « changement radical ». « On nous a promis tant de choses, reprend-il. Dans la rue, on ne peut pas parler ouvertement, alors on rigole sur cette histoire de chaise et d’État. » Une expression par l’humour du scepticisme qui s’est emparé des Palestiniens ? Pour Sabree Saidam, cadre dirigeant du Fatah, « Israël ne devrait pas être autorisé à considérer notre démarche comme unilatérale. D’une certaine manière, nous internationalisons le conflit ».
Fait indéniable, les médias internationaux sont à ce jour davantage excités que les Palestiniens, pour qui l’étape ne modifiera pas la réalité des relations avec l’occupant. « Alors, pourquoi être contre ? », s’interroge Hassan, ingénieur à Hébron. Présentée comme une opération populaire, la campagne « pour la reconnaissance internationale et l’admission à l’ONU » manque en réalité nettement d’assise populaire. Comme les autres, Rawwan attend de voir. « Beaucoup pensent que l’Autorité n’ira pas jusqu’au bout,