Cuba, fantasme papal

Benoît XVI passe trois jours à La Havane, rêvant de participer au retour de la démocratie sur l’île. Un pari loin d’être gagné.

Claude-Marie Vadrot  • 22 mars 2012 abonné·es

Quatorze ans après Jean-Paul II, le pape Benoît XVI sera en visite à La Havane du 26 au 28 mars. Même si Cuba reste imprégnée de catholicisme, l’île n’est pas une « fille de l’Église ». Elle vit plutôt une spiritualité festive marquée par le culte de la Vierge mêlé à ceux de la santería [^2] et parfois du vaudou.

Pas de quoi enthousiasmer le rigorisme cultuel du nouveau pape allemand et de sa curie. Mais le Vatican observe avec intérêt (politique) la mutation de la petite église catholique de l’île et le rôle qu’elle joue depuis trois ans entre le pouvoir de Raúl Castro et ­l’opposition, depuis la libération de prisonniers politiques jusqu’à la mise en place d’un programme de potagers autorisant les jardiniers à vendre sur les marchés libres. En coopération, parfois en concurrence, avec les protestants du Centre Martin-Luther-King, moins nombreux mais proches du pouvoir depuis des années.

Fasciné par la vieille fable politique qui voudrait que le Polonais Jean-Paul II ait provoqué la chute de l’Union soviétique, le nouveau pape allemand rêve de participer au retour de la démocratie à Cuba, que n’ont pourtant pas obtenu des années de blocus américain. Fantasme : l’Église catholique cubaine est pauvre en prêtres, et la pratique religieuse atteint un niveau encore plus faible qu’en France, à l’exclusion de quelques processions rurales mêlant catholicisme, rites africains et quelques dieux accessoires…

Toutefois, l’Église et son cardinal Ortega représentent le seul corps intermédiaire permettant aux héritiers de Fidel Castro de modifier doucement leurs politiques sans se compromettre avec ceux qui les contestent.

[^2]: Religion multiforme originaire des Caraïbes, autrefois pratiquée par les esclaves refusant la religion catholique.

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