Les renouvelables ont un bon fonds

Avec Énergie partagée investissement, les projets citoyens disposent enfin d’un bras financier national pour se développer.

Patrick Piro  • 22 mars 2012 abonné·es

Partout en France, des projets citoyens dans les énergies renouvelables s’en tiennent à une taille modeste faute de pouvoir lever spontanément des fonds auprès du public, notamment dans l’éolien en raison des montants exigés. Pour faire sauter ce verrou, a été lancée en 2010 la création d’un fonds spécifique – Énergie partagée investissement (EPI) – permettant de collecter des capitaux auprès des particuliers. Plusieurs fois retardée, la naissance est annoncée le 19 septembre 2011, quand l’Autorité des marchés financiers délivre enfin son visa.

La Nef, Enercoop, Éoliennes en pays de Vilaine, le Cler, Hespul, Inddigo, l’Agence locale de l’énergie Ardennes : le gratin de la finance solidaire et des renouvelables citoyennes s’est coalisé pour cet accouchement. Techniquement, EPI porte une Offre au public de titres financiers (OPTF). Les particuliers souscrivent des actions de 100 euros[[Voir « Geste utile », Politis n° 1194,
du 8 mars 2012.]], qu’ils peuvent attribuer (ou non) au capital d’un projet que présente EPI. Bégawatts est le premier d’entre eux. « Une dizaine d’autres se préparent » , signale Joël Lebossé, délégué général du fonds. Des projets dans l’éolien, le photovoltaïque, la biomasse, la petite hydraulique, les réseaux de chaleur, mais aussi dans la réduction des consommations d’énergie.

EPI, par sa capacité à émettre rapidement une lettre d’intention d’investissement, permet aux projets citoyens d’amorcer leur levée de fonds, tout en s’adaptant à leurs multiples formes juridiques. L’OPTF vise un capital de 4 millions d’euros au bout d’un an d’activité. Mi-mars, elle avait collecté 1,7 million d’euros d’actions, dont un million déposé dans son berceau par les membres fondateurs. « Le mouvement est encore un peu lent, estime Joël Lebossé, mais il devrait s’accélérer à mesure que des projets arriveront à maturité. » Les partenaires ont élaboré une charte de principes citoyens et solidaires guidant EPI. « Il s’agissait, entre autres, de préciser ce que nous entendons par investissement “citoyen et participatif”, afin d’éviter que le concept soit édulcoré » , explique Christel Sauvage, présidente de l’association Énergie partagée, bras politique du fonds.

Les projets à énergies renouvelables sont sécurisés, constate Joël Lebossé, qui a une solide expérience de la finance solidaire au Québec : les technologies sont éprouvées, et leur économie est prévisible, en raison de soutiens publics garantis. « Le risque principal, c’est la démocratie : il y a péril quand on perd de l’argent, et… quand on en gagne et que les appétits se dévoilent ! Il nous faut inventer un fonctionnement solide sur le long terme. »

Publié dans le dossier
Le retour du peuple
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