PS et sans-papiers : la régularisation, c’est pas pour maintenant

Une délégation de sans-papiers était reçue, mercredi 14 mars, au siège de campagne du Parti socialiste. Ils dénoncent la politique de régularisation au « cas par cas » que promet François Hollande. Reportage. **

Samir Hamma  • 15 mars 2012
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PS et sans-papiers : la régularisation, c’est pas pour maintenant
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Dans une élection marquée par une xénophobie latente, à quoi peut déboucher la réunion de deux réalités diamétralement opposées : l’électoralisme pour le Parti Socialiste, l’ardente nécessité de voir sa situation régularisée pour le sans-papiers? Ils étaient une centaine mercredi après-midi, Maliens, Sénégalais, Marocains, massés devant le siège de campagne de François Hollande, rue de Ségur, pour demander une régularisation sans condition. Face à leur urgence, François Hollande, oppose depuis des mois son éternel esprit de nuance: le cas par cas, bien évidemment !

À 13h30, les « sans-pap’ » prennent petit à petit possession des lieux. Les slogans contre l’éventuelle politique d’immigration « hollandaise » font flores : « Le cas par cas, on n’en veut pas !  », «  Régularisation de tous les sans-papiers !  ». Tahar, 49 ans, Algérien : cela fait douze ans qu’il vit en France, il est marié et père de deux enfants, il dit aspirer à la « normalité ». Pour lui, la normalité, c’est la légalité. Entré en France avec un visa touristique, il fait des pieds et des mains depuis toutes ces années, sous Jospin, Chirac et Sarkozy, pour régulariser sa vie:  « J’ai tout essayé, je travaille, je paye des impôts mais toujours rien… Qu’est-ce qu’ils nous reprochent ? » . Même son de cloche du côté de Mamadou, 31 ans, originaire du Mali. Lui aussi est entré légalement en France, lui aussi travaille et paie des impôts, mais c’est insuffisant pour un gouvernement cynique qui préfère instrumentaliser un sujet bien plus complexe que son discours extrême-droitier.

Racket d’État

14h00, une délégation de l’association « Droit devant ! », à l’origine de la mobilisation, arrive au siège de campagne du candidat socialiste. Un groupe d’une dizaine de personnes, dont une majorité de sans-papiers, se prépare à être reçue par Mireille Le Corre, responsable du pôle Immigration-Intégration dans l’équipe de campagne de François Hollande. Outre la régularisation des sans-papiers, ils profiteront de ce « dialogue » pour exiger du PS, en cas d’élection, de mettre fin à ce qu’ils appellent un racket d’État :

« Depuis 2008, à l’appel de 44 organisations, nous menons une campagne pour dénoncer le racket et l’injustice fiscale que subissent les travailleurs et travailleuses sans papiers  », explique le porte-parole de l’association : «  La majorité d’entre eux travaillent de manière déclarée et paient des cotisations sociales sans pouvoir bénéficier des prestations qui y sont attachées (allocation chômage, retraite…). Nous estimons que l’État français encaisse plusieurs centaines de millions d’euros par an sans jamais rien décaisser ! Par ailleurs, toutes et tous paient des impôts : sur le revenu pour les travailleurs déclarés et sur la consommation via la TVA. Pourtant, l’Etat français ne leur accorde aucun droit et s’obstine à les chasser ».

Du côté du PS, l’attaché de presse de Mireille Le Corre explique gentiment aux quelques journalistes rassemblés au bas de l’immeuble que la direction du parti n’a nullement l’intention de communiquer sur le sujet. À l’extérieur, les sans-papiers n’en démordent pas : « La régularisation, c’est maintenant » , scandent-ils inlassablement.

Après une réunion d’une heure et demie, la délégation sort bredouille : « Le PS ne veut pas infléchir sa position, ils veulent régulariser au cas par cas, mais ils ne sont même pas capables de fixer des critères objectifs » . Une ambiguïté sur le sujet qui émane, notamment, d’un dissensus au sein même du PS.

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