Israël : porteurs d’espoir

Dominique Vidal et Michel Warschawski présentent vingt personnalités qui rendent possible un « autre Israël ».

Denis Sieffert  • 5 avril 2012 abonné·es

Au moment où l’horizon paraît plus bouché que jamais dans le conflit israélo-palestinien, et cela principalement en raison de la droitisation sans précédent de la classe politique israélienne, voilà un livre qui redonne l’espoir.
Il est – sans surprise – l’œuvre de Dominique Vidal et de Michel Warschawski. Sous le titre Un autre Israël est possible, les deux auteurs, historiens et journalistes bien connus de nos lecteurs, y brossent les portraits croisés de « vingt porteurs d’alternatives ».

On y rencontre, entre autres, Daphnee Leef, la « pasionaria des indignés », Yehuda Shaul, l’ancien soldat, animateur de « Breaking The Silence », la députée arabe Hanine Zoabi, Hassan Jsabareen, le directeur de l’association de défense des Arabes israéliens, Adalah, l’avocate Lea Tsemel, l’historien Zeev Sternhell, et bien d’autres. Les deux auteurs ont eu le bon goût de ne pas trop recruter dans la marge, et de mettre, ou remettre, en lumière des personnalités très diverses qui sont loin d’être des boutefeux. On est même étonné de trouver là un homme comme Ilan Greilsammer, défini par les auteurs comme « l’intellectuel-israélien-du-camp-de-la-paix ». Figure de la « bien-pensance » ô combien appréciée des médias français pour sa « modération »… et sa parfaite maîtrise de notre langue. Ce sioniste de gauche croit que le salut peut venir du mouvement social contre la politique libérale du gouvernement Netanyahou. C’est, selon lui, sur cet axe que peut se recomposer une gauche qui pourrait ensuite reposer la question de l’État palestinien.

Non loin de lui mais plus radical assurément, voici Avraham Burg, éphémère président de la Knesset. Pour lui, « la formule à deux États est sans aucun doute la plus praticable ». Mais, dit-il, « si nous tardons trop, le moment “bi-étatique” risque d’être dépassé ». Burg évoque donc la formule à un État avec des « droits constitutionnels, civiques et humains égaux pour tous, à Naplouse comme à Tel-Aviv ». Et voici l’admirable Nurit Peled, fille du général Mattityahou Peled, qui fut l’un des premiers officiels israéliens à nouer des contacts avec l’OLP, au milieu des années 1970. Cette femme, qui a perdu une fille dans un attentat palestinien en 1997, trouve la force de dire : « C’est à eux [Netanyahou et le Likoud] que je ne pardonnerai jamais. » Son analyse de la société israélienne, du mouvement social (« la justice sociale sans justice pour les Palestiniens, qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? ») souligne les limites des « Indignés ».

Autre rencontre, autre portrait : Daniel Boyarin. Le dialogue avec cet ultrareligieux, titulaire de la chaire de culture talmudique à l’université de Berkeley, est l’occasion pour les auteurs d’une mise au point. Dans le discours français « de gauche », on a tôt fait, au nom de la laïcité, de tenir les juifs orthodoxes pour responsables de la situation. Or, Boyarin et d’autres sont hostiles à la colonisation. Et ceux qui mènent la pire des politiques coloniales sont des « laïques ». Avec humour, Boyarin résume leur point de vue : « Dieu n’existe pas, mais il nous a donné la Terre d’Israël. » En effet, un autre Israël est possible. Mais quand ?

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