Pas de quartier pour les mineurs

Erwan Manac'h  • 12 avril 2012 abonné·es

Cinq ans de suppression de postes et de surenchère répressive ont plongé la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) dans une véritable crise. Une grève des professionnels de cette institution a accompagné vendredi 6 avril la première audience correctionnelle pour mineurs du palais de justice de Paris. Procédure nouvelle adoptée dans la loi Mercier du 10 août 2011, elle doit permettre d’accélérer le jugement des mineurs récidivistes en les présentant devant un tribunal correctionnel présidé par un juge pour enfants, en remplacement du tribunal pour enfants, où le juge est accompagné de deux citoyens assesseurs, nommés pour quatre ans parmi des volontaires.

Les professionnels dénoncent une rupture symbolique « dangereuse » avec la justice des mineurs, spécifique, qui donnait la priorité aux mesures éducatives. Première régression importante : dans les tribunaux correctionnels pour mineurs, le juge ne connaît pas l’adolescent qui se présente pour une affaire en récidive.

« Sans suivi, il est impossible d’adapter la réponse à des enfants parfois très difficiles », s’inquiète Catherine Sultan, présidente de l’Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille, et présidente du tribunal pour enfants de Créteil, qui ne mâchait pas ses mots vendredi matin aux côtés des ­représentants des ­syndicats de la magistrature, des avocats de France, des professionnels de la PJJ et des psychologues.

Le tribunal correctionnel pour enfants a clairement pour objectif de développer une réponse plus rapide et plus sévère, parfois en dépit du bon sens : « Dans une des premières audiences en correctionnelle pour mineurs qui se sont tenues ailleurs en France ces derniers jours, un adolescent de 16 ans a été jugé pour un vol de préservatifs », se désole Catherine Sultan.
Outre les peines plancher et la surenchère législative, les acteurs de terrain doivent faire face à une saignée radicale. De nombreuses structures éducatives ouvertes laissent la place à des centres éducatifs fermés (CEF) que le manque de psychologues et d’éducateurs, rend « ingérables ».

Sous Sarkozy, environ deux départs à la retraite sur trois n’ont pas été remplacés, selon le chiffre de Maria Inès, secrétaire nationale du syndicat SNPES-PJJ FSU : « Les services sont dans une situation de quasi-rupture. »
L’alternative proposée par le candidat socialiste se résume au doublement du nombre de CEF. « Aucun bilan sérieux n’a été fait de ces structures, comment peut-on annoncer un doublement dans ces conditions ? », s’agace Maria Ines.

Société
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

Tour de France : Franck Ferrand, commentateur réac’ toujours en selle
Médias 11 juillet 2025

Tour de France : Franck Ferrand, commentateur réac’ toujours en selle

Cette année encore, France Télévisions a reconduit Franck Ferrand aux commentaires en charge du patrimoine lors du Tour de France. L’historien, très contesté, fan de Zemmour et de thèses révisionnistes, n’hésite pas, insidieusement, à faire passer ses idées.
Par Pierre Jequier-Zalc
La CGT et le Tour de France : quand sport et luttes se marient bien
Luttes 11 juillet 2025

La CGT et le Tour de France : quand sport et luttes se marient bien

Si le Tour de France est avant tout un événement sportif, il permet aussi à des luttes sociales et politiques de mettre en avant leur combat. Comme lundi dernier, à Dunkerque pour sauver les emplois d’ArcelorMittal.
Par Pierre Jequier-Zalc
« Ils parlent d’échange de migrants comme si les personnes étaient des objets »
Entretien 11 juillet 2025 abonné·es

« Ils parlent d’échange de migrants comme si les personnes étaient des objets »

Alors qu’un accord d’échange des personnes exilées a été trouvé entre la France et le Royaume-Uni, Amélie Moyart, d’Utopia 56, revient sur les politiques répressives à la frontière et le drame qui a conduit l’association à porter plainte contre X pour homicide involontaire.
Par Élise Leclercq
Terrorisme d’extrême droite : derrière le site d’AFO, Alain Angelini, soutenu par le RN en 2020
Enquête 10 juillet 2025 abonné·es

Terrorisme d’extrême droite : derrière le site d’AFO, Alain Angelini, soutenu par le RN en 2020

L’homme, alias Napoléon de Guerlasse, est l’administrateur du site Guerre de France, qui servait au recrutement du groupe jugé pour association de malfaiteurs terroriste. Militant d’extrême droite soutenu par le parti lepéniste aux municipales de 2020, son absence au procès interroge.
Par Pauline Migevant