« Il faut changer de cap ! »

La révision de la réforme de 2010 constitue un dossier social majeur pour le nouveau gouvernement et les syndicats.

Thierry Brun  • 24 mai 2012 abonné·es

Michel Sapin, le nouveau ministre du Travail, de l’Emploi et du Dialogue social, a promis que le dossier des retraites serait rouvert avant fin juin à travers des consultations avec les partenaires sociaux. Un premier décret devrait permettre rapidement aux salariés ayant travaillé dès 18 ans de partir en retraite à 60 ans s’ils ont cotisé quarante et un ans.

Pour la CFDT, il s’agit de remettre en place ce que la confédération « avait obtenu en 2003 », a déclaré François Chérèque, secrétaire général, souhaitant que le président de la République reçoive les partenaires sociaux « avant les élections législatives ». La CGT, elle, veut aller plus loin dans la mise en cause des réformes.

Le gouvernement est prêt à revoir la réforme des retraites de 2010, mais jusqu’à quel point ?

Éric Aubin : Il est supposé y avoir deux phases, la première étant le décret visant à revenir à la retraite à 60 ans sous certaines conditions. Nous serons consultés et nous dirons que les trimestres validés, c’est-à-dire les périodes de chômage, de maladie et de maternité, doivent être pris en compte.

Une deuxième phase a été annoncée avec une grande négociation portant, entre autres, sur l’ensemble du dossier des retraites. Dans cette discussion, nous revendiquons le retour de l’âge légal à 60 ans pour tous les salariés, ainsi que la prise en compte de la pénibilité, ce qui nécessite de revoir les précédentes réformes.

Mais il n’y a pas que la réforme de 2010 à combattre. Le nouveau gouvernement n’échappera pas à ce débat  : il a le choix entre poursuivre la baisse des pensions ou changer de cap pour permettre un redressement de leur niveau. Le niveau de pension moyen, tous régimes confondus, est de 1 100 euros pour les hommes et de 877 euros pour les femmes. Est-ce que les retraités pourront vivre avec ça ?

Le choix de revoir la réforme des retraites est-il pour vous un signe donné à l’Europe ?

Tous les plans d’austérité en Europe visent à reculer l’âge de départ à la retraite. Que la France revienne sur l’âge légal de départ en le fixant à 60 ans pour certaines catégories de salariés est à ­contre-courant de ce qui se passe en Europe. La décision du nouveau gouvernement peut être un point d’appui.

La CGT devra proposer des solutions de financement du régime de retraite, dont le déficit devrait atteindre près de 14 milliards d’euros cette année…

Depuis la première réforme Balladur de 1993, on demande que soit mise sur la table des négociations une réforme du financement de la protection sociale et particulièrement du régime de retraites. Nous avons trois propositions phares : l’élargissement de l’assiette de cotisations à tous les revenus, comme l’intéressement et la participation ; la mise à contribution des revenus financiers des entreprises ; la modulation des cotisations en fonction de la politique salariale et de l’emploi des entreprises. Il faut un système de cotisations qui favorise l’emploi et une vraie politique salariale.

Ces propositions sont-elles partagées par d’autres organisations syndicales ?

Nous ne sommes pas tout à fait d’accord avec la CFDT, qui souhaite une réforme systémique avec le passage à un régime par points, qui est un régime très contributif, pénalisant ceux qui sont dans la précarité. Nous sommes opposés à ce type de régime.

Si l’on examine ce que produisent les régimes complémentaires par points Agirc et Arrco, on s’aperçoit, par exemple, que, dans le cas de l’Agirc, la différence entre les hommes et les femmes est de plus de 60 %.

Économie Travail
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