Un discours « attrape-tout »

Michel Soudais  • 3 mai 2012
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Depuis le 22 avril, Marine Le Pen est omniprésente dans les gazettes. Ici, on salue sa « percée », quand ce n’est pas sa « victoire », en évitant soigneusement tout rappel des ambitions qu’elle affichait encore crânement à la veille du scrutin (être au second tour, au-dessus de 20 %), de crainte sans doute de relativiser ce « succès » présenté comme une réussite toute personnelle. Là, on rappelle toutes les tentatives, réputées désormais fructueuses, de la fille de Jean-Marie Le Pen pour « dédiaboliser » l’image du parti qu’elle a reçu en héritage, en oubliant de pointer les limites de cette prétendue normalisation. Ailleurs, on insiste sur la nouveauté de son discours, qui serait comme une sorte d’aggiornamento idéologique. Ce qui revient à l’ériger un peu vite en idéologue alors qu’elle s’est contentée de piocher (habilement) dans les variantes du lepénisme mises au point depuis vingt ans dans les cuisines de sa formation, laquelle ne l’a pas attendue pour être un parti attrape-tout.

Dès lors, comment caractériser le parti de Marine Le Pen ? Fasciste ? Populiste ? Xénophobe ? Et la caractérisation induit-elle une stratégie : dialogue ou anathème ? Il nous a paru utile de revenir sur six discours correspondant à six meetings de sa campagne mettant chacun en avant un thème dominant. Jusqu’au meeting de Nantes, le 25 mars, la tonalité est plutôt sociale et antilibérale. Mais ce n’est évidemment jamais un discours de gauche. Même lorsque sont invoquées la « justice sociale » ou la « défense » des services publics en zone rurale, il s’agit toujours de cibler l’immigré, l’autre, que ce soit le jeune des cités ou le Rom qui a une belle voiture, et de dénoncer l’idéologie « multiculturaliste » ou la dissolution de l’identité nationale. La xénophobie donne sa cohérence à l’ensemble du discours. Marine Le Pen amalgame les peurs, les insécurités, les injustices sociales, et les retourne contre l’immigré. Typiquement la politique du bouc émissaire.

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