Continuité du social-libéralisme

Dominique Plihon  • 30 août 2012 abonné·es

L’histoire se répète-t-elle ?
Pendant la campagne des élections
législatives de 1997, qui a porté la
gauche au pouvoir, Lionel Jospin
avait annoncé vouloir modifier
le Pacte de stabilité, signé à
Amsterdam, considéré comme une
concession faite au gouvernement
allemand. Un certain DSK avait
renégocié ce traité, ce qui s’était
soldé par un simple ajout sémantique
au titre du traité, devenu Pacte de
stabilité et de croissance (PSC),
sans modifier les principales règles
limitant les déficits publics à 3 % du
PIB et les dettes publiques à 60 %.

Quinze ans plus tard, le Parti
socialiste revient au pouvoir.
François Hollande annonce qu’il veut
ajouter l’objectif de croissance dans
le Pacte budgétaire européen, le
nouveau Traité pour la solidarité, la
cohésion et la gouvernance (TSCG)
concocté par Angela Merkel et
Nicolas Sarkozy. Le TSCG durcit
les règles du PSC en remplaçant la
barre de 3 % par la « règle d’or »,
qui veut limiter à 0,5 % le déficit
structurel, hors effet conjoncturel.
La Cour des comptes, qui appuie
les dispositions du TSCG, a
estimé le déficit structurel de la
France à environ 100 milliards
d’euros en 2010. Ramener
celui-ci à 0,5 % impliquerait des
économies budgétaires à hauteur
de 90 milliards. Les Économistes
atterrés (1) – ils ne sont plus les
seuls ! (2) – ont montré qu’une telle
politique d’austérité plongera les
pays européens dans une récession
générale avec un coût social élevé.

Une autre disposition
dangereuse a été adoptée :
la procédure du « semestre
européen », selon laquelle
les politiques économiques
nationales devront être évaluées
par la Commission européenne
avant d’être adoptées par les
institutions élues (gouvernements
et parlements) des pays membres,
une atteinte à la démocratie, en
l’absence d’une véritable démocratie
européenne.

Quelle est la politique du
nouveau gouvernement socialiste ?
François Hollande a renoncé à
renégocier le TSCG et s’est contenté
d’un « Pacte de croissance »
annexé au traité, seule concession
obtenue du gouvernement allemand.
Véritable supercherie : ce pacte
consiste à mobiliser 120 milliards
d’euros déjà programmés par l’UE
pour être dépensés d’ici à 2014.
Ce financement de l’économie
est trop faible (moins de 1 %
du PIB de l’UE) pour avoir
un impact significatif sur la
croissance. De plus, en mettant
uniquement l’accent sur la
croissance, les socialistes
français s’abstiennent de toute
interrogation sur les dimensions
productivistes et antidémocratiques
de la construction européenne.

À cela s’ajoute la décision
ahurissante du Conseil
constitutionnel, pilier de l’État
néolibéral, selon laquelle le TSCG
n’affecte pas la Constitution et la
souveraineté françaises, et peut être
adopté par une simple loi organique
votée par le Parlement.
Tout donne à penser que, revenant
sur ses promesses, François
Hollande fera adopter rapidement le
TSCG, au lieu d’utiliser la légitimité
que lui confèrent ses victoires
électorales pour imposer la révision.
Il n’y a alors qu’une solution : nous
battre pour exiger un référendum,
seul moyen d’avoir un débat
démocratique et un vote populaire
sur l’Europe que nous voulons.

Monde
Temps de lecture : 3 minutes