Des vainqueurs et des vaincus

Le Hamas et l’Égypte sortent plutôt renforcés de huit jours d’offensive israélienne contre Gaza.

Denis Sieffert  • 29 novembre 2012 abonné·es

Le bilan de ces huit jours d’assaut de l’armée israélienne contre Gaza est à la fois humain et politique. Selon le ministère de la Santé du Hamas, ce sont 166 Palestiniens qui ont péri sous les bombes israéliennes, tandis que 1 235 autres ont été blessés, dans leur immense majorité des civils. En Israël, six personnes, dont deux soldats, ont été tuées lors de tirs de roquettes provenant de Gaza, et, selon l’armée, 240 autres ont été blessées. Mais, à Gaza, il faut aussi considérer les destructions de maisons et d’infrastructures, et les dommages différés causés sur l’environnement et les conditions sanitaires. « Le coût total des dégâts est de 1   245   milliards de dollars », a estimé dimanche Taher al-Nounou, porte-parole du gouvernement du Hamas. Deux cents maisons ont été détruites, et huit mille autres endommagées.

Sur le plan politique, l’opération est jugée plutôt bénéfique pour le Hamas, qui a montré sa capacité de résistance. Le fait que des missiles aient atteint les environs de Jérusalem et de Tel-Aviv témoigne d’un renforcement de son arsenal militaire et fait peser une menace sur Israël. De plus, l’offensive israélienne a eu pour effet d’obliger le Hamas et le Fatah, le parti de Mahmoud Abbas, à afficher une réconciliation au moins provisoire, y compris à Gaza. A contrario, le bilan est plutôt négatif pour Benyamin Netanyahou, contraint de renoncer à une offensive terrestre sans avoir atteint ses objectifs. Le Premier ministre a d’ailleurs subi une érosion dans les sondages en vue des élections anticipées du 22   janvier. Sympathisants et adhérents du Likoud lui reprochent de ne pas avoir été jusqu’au bout de l’opération. On ignorait encore lundi si le résultat des primaires organisées au sein du Likoud pour désigner les candidats aux législatives refléterait ce mécontentement. Le puissant lobby des colons menait en tout cas la bataille, publiant les noms des candidats auxquels il apportait son soutien parce qu’ils s’opposent à toute éventualité de création d’un État palestinien. Mais les principaux vainqueurs politiques de cet épisode sont les médiateurs turcs et surtout égyptiens. Le Président égyptien Mohammed Morsi, qui a accueilli au Caire les émissaires israéliens et les représentants du Hamas, est sorti renforcé sur un plan international. Reste à savoir s’il n’est pas en train de dilapider cet acquis par des décisions qui, sur un plan intérieur, lui attirent l’opposition des juges et d’une grande partie de la jeunesse (voir ci-contre). Enfin, l’offensive israélienne a eu pour conséquence inattendue d’amener les États-Unis à se réinvestir dans un dossier qui, pour le moins, n’était pas prioritaire pour Barack Obama.

Encore un résultat que Benyamin Netanyahou ne souhaitait sûrement pas. Mais les bilans dans cette affaire sont aussi fragiles que la trêve. Deux jours après le début de celle-ci, l’armée israélienne a tiré sur un groupe d’agriculteurs qui se rendaient sur leurs terres, situées à proximité de la bande frontalière. Et, le 23 novembre, un Palestinien de 20 ans a été tué dans les mêmes circonstances, non loin de Khan Younis, dans le sud du territoire.

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