Une demi-protection

La proposition de loi EELV sur les lanceurs d’alerte a été édulcorée par le Sénat.

Patrick Piro  • 29 novembre 2012 abonné·es

Le Sénat a adopté, jeudi 22 novembre, la proposition de loi sur la protection des lanceurs d’alerte, ces scientifiques ou particuliers qui se dressent, en solitaire bien souvent, pour dénoncer publiquement des scandales sanitaires ou environnementaux. Une première en France. Si plusieurs affaires récentes ont connu des débouchés grâce à la pugnacité de personnalités comme André Cicolella (éther de glycol, bisphénol A, etc.), Henri Pézerat (amiante), Gilles-Éric Séralini (OGM), Irène Frachon (Mediator)… combien d’autres étouffées faute de cadre juridique pour protéger les lanceurs d’alerte face aux institutions et aux intérêts économiques qu’ils affrontent ?

Le texte prévoit notamment la création, dans les établissements agissant dans le domaine de la santé, d’un registre des alertes qui sera transmis aux ministères pour traitement. Les lanceurs bénéficieront également de la protection accordée aux délégués syndicaux. Les sénateurs EELV, à l’origine de cette proposition de loi, présentée par Marie-Christine Blandin, ont dû cependant céder sur un point central pour enlever le vote : le dispositif ne sera pas orchestré par une Haute Autorité, dont le PS et le gouvernement ne voulaient pas, mais par une Commission nationale, certes « indépendante », mais dotée de prérogatives et de moyens bien plus limités. En particulier, elle n’aura pas compétence pour protéger les lanceurs d’alerte qui devront avoir recours aux juridictions habituelles pour cela. Une déception pour EELV, traduite par une boulette de communication : un premier communiqué, visiblement préparé à l’avance et vite démenti, félicitait son groupe sénatorial pour la création… d’une Haute Autorité. Et puis le parcours législatif du texte est loin d’être achevé. Il lui faudra même, pour certains aspects, l’imprimatur des partenaires sociaux.

Écologie
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