Accords pour l’emploi : Stratégie du fait accompli

Le gouvernement mise sur le dialogue social pour obtenir des accords décidés par le patronat. Une méthode éprouvée.

Thierry Brun  • 31 janvier 2013 abonné·es

Présentée par François Hollande comme une méthode en rupture avec celle de l’ère Sarkozy, la négociation entre partenaires sociaux, lancée lors de la grande conférence sociale de juillet 2012, n’a rien de nouveau. Le cadre paritaire retenu pour discuter d’un accord national interprofessionnel (ANI) « au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l’emploi » a imposé l’emprise patronale sur les organismes sociaux, et validé les contre-réformes sociales des précédents quinquennats. Le scénario est le même depuis des décennies : dans un contexte où les marchés financiers font la loi, le Medef est en position de force et s’appuie sur un syndicalisme réformiste, incarné par la CFDT, légitimé par le dialogue social. Ainsi, le texte de l’accord national mis en discussion à l’automne 2012 a été rédigé, puis modifié au fil des réunions, par les négociateurs de l’organisation patronale.

Les propositions ont certes suscité quelques remous chez les syndicats, mais elles n’ont été revues qu’à la marge par le Medef pour obtenir la signature, le 11 janvier, de trois syndicats (CFDT, CFTC et CFE-CGC) représentant une minorité de salariés. La même méthode avait été employée en 2008 avec un autre accord national de « modernisation du marché du travail », élaboré par le Medef, qui avait entériné la création des ruptures conventionnelles, très défavorables aux salariés, et dont le nombre a explosé. De la même façon, concernant le renflouement des retraites complémentaires (Agirc et Arrco), les partenaires sociaux doivent se mettre d’accord sur la base d’un projet d’accord présenté le 15 janvier par le Medef lors de la troisième séance de négociations sur cette question. Ce dernier pousse son avantage le plus loin possible en proposant une baisse des pensions pour résoudre les problèmes de financement. Le temps des acquis sociaux gagnés de haute lutte est bien révolu, quand un André Bergeron, ancien secrétaire général de FO, pouvait dire qu’il y a « du grain à moudre », une formule restée dans les mémoires, rappelle le syndicaliste Pierre Khalfa, coprésident de la fondation Copernic. Pour lui, « il ne s’agit plus que de négocier les reculs ».

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