«Si la France a refusé un visa à Aminata Traore, c’est très grave ! »

S’il ne partage pas sa position sur l’intervention militaire française au Mali, Ibrahima Coulibaly, syndicaliste paysan, condamne fermement la probable mesure de rétorsion de la France envers intellectuelle malienne.

Patrick Piro  • 21 juin 2013
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«Si la France a refusé un visa à Aminata Traore, c’est très grave ! »

Nous avions relaté dans nos colonnes la mesure dont a été victime Aminata Traore. Des précisions : à l’occasion d’une invitation à participer à une conférence en Allemagne, cette ex-ministre de la culture demande un « visa Schengen », qui lui permettra ensuite de se rendre à Paris. Il lui est refusé. L’intellectuelle malienne, dont la notoriété est internationale, est non grata, elle devra se contenter de son séjour en Allemagne. Le quai d’Orsay jure ses grands dieux qu’il n’y est pour rien. Aminata Traore, elle, affirme tenir de la bouche d’un fonctionnaire allemand que Paris a mis son veto à l’extension de son visa à l’espace Schengen, interdisant donc son passage en France.

La position d’Aminata Traore est isolée, au Mali, même au sein de la frange la plus progressiste de la société, comme en témoigne le commentaire d’Ibrahima Coulibaly, que nous avons recueilli à Jakarta lors de la récente assemblée du mouvement international La Via Campesina. À l’origine de la Coordination nationale des organisations paysannes du Mali (CNOP), très attachée à l’affirmation des organisations rurales de base dans le débat public au Mali, radicalement opposé au dogme libéralisme et tout autant aux relents du colonialisme, Ibrahima Coulibaly agit depuis des années pour faire reconnaître à la paysannerie une place plus en rapport avec son importance dans la société de son pays, ainsi que dans tout l’espace ouest-africain.

Il n’en juge pas moins que le péril imminent d’une conquête du Mali par les « barbares » islamistes justifiait totalement le débarquement des forces françaises. Et qu’au lieu de chercher des poux à la France, l’on doit d’abord s’interroger sur l’incapacité du Mali à préserver ses intérêts fondamentaux, livré à une corruption politique qui l’affaiblit en permanence en dépit du dynamisme d’une société civile parmi les plus actives du continent.

Monde
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