François Hollande veut une loi sur la fin de vie

Le Comité d’éthique a rendu hier un avis défavorable à une loi sur l’euthanasie. Le président a rebondi en annonçant une loi améliorant la loi Leonetti de 2005.

Ingrid Merckx  • 2 juillet 2013
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Le 1er juillet, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a rendu son avis n°121 sur la fin de vie. Il s’y dit défavorable à une loi autorisant le suicide assisté et l’euthanasie. En revanche, il défend une évolution de la loi Leonetti de 2005 sur la fin de vie.

Le président François Hollande, qui avait saisi le CCNE sur ce point, a déclaré le jour même qu’il y aurait «un projet de loi sans doute avant la fin de l’année» sur la fin de vie. Celui-ci devrait «compléter et améliorer» la loi Leonetti. C’était l’un de ses engagements de campagne.

D’après le CCNE, une «aide active à mourir» pourrait présenter le risque d’être perçue comme un «abandon de soins» par des personnes vulnérables. C’est pourquoi «la majorité de ses membres recommande de ne pas légaliser l’assistance au suicide et/ou l’euthanasie» .

Une minorité au CCNE estimant que la limite entre «laisser mourir» et «faire mourir» a déjà été abolie par les lois de 2002 et 2005, exprime une position divergente, jointe à l’avis.

Pour le CCNE, «la discussion n’est pas close et doit se poursuivre» .

En attendant, ses membres sont arrivés à un consensus concernant les propositions suivantes :

«- la nécessité de faire cesser toutes les situations d’indignité qui entourent encore trop souvent la fin de vie ;
– la nécessité de rendre accessible à tous le droit aux soins palliatifs – droit reconnu par le législateur depuis quatorze ans – et de développer l’accès aux soins palliatifs à domicile ;
– le respect des directives anticipées ; lorsqu’elles ont été rédigées en présence d’un médecin traitant, et dans des circonstances où une maladie grave a été annoncée, les directives anticipées devraient être contraignantes pour les soignants, sauf exception dûment justifiée par écrit ;
– le respect du droit de la personne en fin de vie à une sédation profonde jusqu’au décès si elle en fait la demande, lorsque les traitements, voire l’alimentation et l’hydratation ont été interrompus à sa demande.»

Un des points les plus importants étant l’aspect «contraignant» pour les médecins des directives anticipées. La Société française d’accompagnement et de soins palliatifs souligne également la modification de la décision collégiale proposée par le CCNE : que tous les professionnels en lien avec le patient puissent être consultés. Tous les proches désirant s’exprimer devraient pouvoir le faire.

Enfin, les membres du CCNE se sont déclarés très « réservés » sur les «indications de l’assistance au suicide et/ou de l’euthanasie dans les pays qui les ont dépénalisées ou autorisées» . Ils manifestent «une inquiétude concernant l’élargissement de ces indications dans certains pays» , notamment la Belgique.

La Fondation Lejeune, très catholique et opposée à l’euthanasie, dénonce sur le site Généthique, «le double jeu dont le Comité d’éthique est familier et qui permet de lui faire dire ce qu’on veut» . Pour Jean-Marie Le Méné, son président, le CCNE «accommode la transgression éthique au rythme d’acceptabilité de l’opinion» . À la suite du rapport Sicard et de celui de l’Ordre des Médecins, «[il joue] sur les mots et [fait] le lit d’une tendance bien nette : non à l’euthanasie, trop polémique aujourd’hui, oui à la sédation profonde, qui conduit au même effet» .

De son côté, la députée écologiste de la Vienne, Véronique Massoneau milite pour une loi sur la fin de vie sur le modèle belge. Elle estime que l’avis du CCNE est dominé par des positions médicales. Mais pour l’heure, c’est encore aux médecins qu’appartient la décision finale.

Santé
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