UIMM : mécanique d’une escroquerie

Fausses formations, faux apprentis, fausses factures… Comment l’UIMM alimentait sa caisse noire.

Thierry Brun  • 17 octobre 2013 abonné·es

C’est un cas d’école de la fraude à la formation professionnelle ! L’ex-dirigeant de l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM), Denis Gautier-Sauvagnac, et huit cadres de la puissante fédération patronale comparaissent jusqu’au 22 octobre devant le tribunal correctionnel de Paris pour le détournement de plusieurs millions d’euros destinés à « fluidifier les relations sociales ». Dès 2007, l’enquête judiciaire a révélé l’existence d’une caisse « d’entraide professionnelle des industries et des métaux » (Epim) ainsi que des circuits de financement opaques des organismes de formation rattachés à l’UIMM.

En 2008, Politis a publié le témoignage d’Annick Lepage, ancienne salariée d’un centre de formation lié à la Fédération des industries mécaniques (FIM) entre 1996 et 2001, qui a décrit au juger Roger Le Loire, chargé d’instruire le dossier de la caisse noire de l’UIMM, l’incroyable système de détournement de fonds dont elle a été témoin [^2]. La principale fraude dénoncée était un système de fausses factures pour des formations non dispensées, ainsi qu’une facturation de formation à des apprentis « fantômes ». Dans ce système, les membres de la direction de la FIM bénéficiaient en contrepartie de rémunérations en tant que « conseillers » du centre de formation. « Ce centre, qui percevait donc des fonds indus, recevait lui-même de plusieurs associations de l’UIMM des factures ne correspondant à rien. Le “racketteur” principal était l’Association pour la documentation et l’assistance des entreprises (Adase) », décrit Annick Lepage lors de son audition en 2011 par la commission d’enquête parlementaire « sur les mécanismes de financement des organisations syndicales d’employeurs et de salariés ».

Le patronat de la métallurgie est aussi montré du doigt pour cet ingénieux mécanisme consistant à puiser dans les fonds de l’apprentissage pour financer l’OPCAIM, organisme agréé de l’industrie métallurgique, chargé de collecter les fonds de la formation professionnelle. « Selon ses comptes, l’UIMM a perçu, en 2010, 1,63 million d’euros au titre de sa gestion de l’OPCAIM », précise le rapport de l’enquête parlementaire, qui souligne que l’organisation dispose pourtant de réserves de trésorerie s’élevant à 500 millions d’euros.

[^2]: Lire ce témoignage dans « Mauvais fonds », article publié le 30 avril 2008, Politis n° 1000.

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