Fiscalité : ce que propose la gauche

Du Parti de gauche au PS en passant par EELV, les pistes d’action diffèrent fortement. Inventaire non exhaustif.

Camille Selosse  • 28 novembre 2013 abonné·es

Il n’y aura certes pas de révolution fiscale en 2015 et au-delà, mais chacun à gauche et au gouvernement a sous le bras son dossier de propositions de réforme pour le « grand débat national » promis par Jean-Marc Ayrault. Le sujet inspire traditionnellement les partis de gauche. Quand ils ne sont pas au pouvoir…

« Revenir à une vision de l’impôt citoyen »

Guillaume Etievant, économiste et secrétaire national du Parti de gauche

Pour le Parti de gauche (PG), il faut une refonte de l’assiette de l’impôt sur le revenu en se fondant sur celle de la contribution sociale généralisée (CSG, qui participe au financement de la Sécurité sociale) et sur une plus grande progressivité de l’impôt « en créant 14 tranches, dont la dernière, correspondant à 20 fois le revenu médian, subirait une taxation à 100 % », explique Guillaume Etievant. Autre point : la TVA, symbole de l’injustice fiscale. Le gouvernement a décidé une hausse qui prendra effet le 1er janvier (6,6 milliards d’euros prélevés sur les ménages en 2014). Le PG conteste cette augmentation et propose la création d’une TVA à 33 % sur les produits de grand luxe et une taxe « sur l’immobilier de luxe et les hautes transactions ». Recettes prévues pour ces impôts qui ne toucheraient pas les classes moyennes et populaires : respectivement 4,6 et 4,5 milliards d’euros. Vient ensuite la question des niches fiscales. La suppression des plus « honteuses », c’est-à-dire celles qui profitent aux grandes entreprises (notamment via l’optimisation fiscale qui leur permet de payer peu d’impôts sur les bénéfices), est ardemment réclamée. Outre la question de recettes nouvelles, la refonte de l’impôt permettrait de « revenir sur une vision inégalitaire ». Ainsi, le PG milite pour une individualisation de l’impôt, car le quotient conjugal, par exemple, favorise l’inégalité homme-femme, ayant tendance à faire du salaire féminin un revenu d’appoint. Pour Guillaume Etievant, «   il y a une vraie urgence ». «   Il faut revenir à l’impôt tel qu’il a été conçu en 1789 : un outil de redistribution et non un moyen de donner des cadeaux aux entreprises, comme c’est le cas pour le crédit d’impôt financé par la hausse de la TVA. »

« Mettre en place une réforme globale »

Agnès Michel, responsable de la commission économie et social d’EELV

Pour EELV, la réforme doit s’articuler autour de trois grands principes. Tout d’abord, une plus grande progressivité de l’impôt, notamment via une fusion de la CSG et de l’impôt sur le revenu. Dans un souci de transparence, l’écologiste Agnès Michel demande la suppression des niches fiscales «   injustes, coûteuses et inutiles », pour «   qu’on sache enfin qui paie réellement quoi ». EELV plaide aussi pour une plus grande équité, inscrite dans un projet global de transition écologique et appuyée par une fiscalité écologique : «   Nous souhaitons accompagner un changement des comportements. C’est d’autant plus primordial que tous nos voisins, y compris ceux qu’on érige en modèle quand ça nous arrange, ont mis en place ces dispositifs. »

« Une réforme si la situation économique le permet »

Pierre Moscovici, ministre de l’Économie, membre du comité de pilotage de la réforme fiscale

Dans un livre publié en octobre et intitulé Combats  (Flammarion), Pierre Moscovici donne une définition plutôt ambitieuse d’une réforme qui instaurerait la progressivité de l’impôt, « élément fondamental de l’acceptabilité politique de l’impôt républicain ». Le ministre cite l’économiste Thomas Piketty, coauteur du livre choc Pour une révolution fiscale, paru au Seuil en 2011. Il reprend l’idée du prélèvement de l’impôt à la source et d’une assiette plus large, avec une plus grande progressivité de l’impôt sur le revenu. Mais cela à la condition « que la situation économique le permette ». Tout est là ! Et dans le cadre étroit d’une politique économique que Pierre Moscovici nomme lui-même « socialisme de l’offre ». Autrement dit, le retour de la croissance découlerait d’une politique favorable aux entreprises, accompagnée d’une politique de réduction des déficits s’appuyant sur des économies réalisées en taillant dans le budget de l’État, de la protection sociale et des ménages.

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