Représentativité patronale : premier regard sur le rapport Combrexelle

Il est de bon ton en France de contester la représentativité des organisations syndicales ouvrières. Des officines, des experts s’y consacrent. Des parlementaires, comme Nicolas Perruchot, s’en font les chantres. Mais la question de la représentativité patronale est rarement évoquée ce qui est paradoxal en un temps où le moindre haussement de sourcil du MEDEF ou de la CGPME, à Lyon ou à Quimper, provoque émoi et recul du gouvernement.
_ Le rapport remis sur ce sujet par Jean-Denis Combrexelle à son Ministre ne manque pas de ce fait d’intérêt et notamment pour l’Economie sociale : premier regard sur un texte à disséquer.

Jean-Philippe Milesy  • 6 décembre 2013
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Les syndicats ouvriers français font l’objet de campagnes usantes contestant leur légitimité alors que les mêmes publicistes se réclament d’un dialogue social de plus en plus indéfinissable. Le chiffre en 8% de salariés « encartés » est une antienne lassante; la comparaison qui est constamment faite à des systèmes étrangers d’autant plus incomparables que l’accès à des prestations sociales qui sont en France « universelles » comme mutuelles, retraites, vacances, sont dans ces pays liés à la carte syndicale est irrecevable. On omet aussi de dire que le fait d’être syndiqué en France, à de rares exceptions, entraîne de fâcheuses conséquences pour la carrière professionnelle. La peur est la première cause énoncée par les salariés de leur non-syndicalisation.
Et cependant les élections professionnelles connaissent des taux de participations que les élections politiques peinent à atteindre. Et les syndicats ont bien plus d’adhérents que les grands partis pôlitiques qui se partagent le pouvoir.
Enfin une loi, d’août 2008 à bien des égards contestable est venue apporter un cadre légal à la « représentativité » des OS françaises.

Qu’en est-il pour les organisations patronales ?
Le MEDEF, avec son organisation supplétive la CGPME revendique clairement le monopole de représentation des entreprises pour lesquelles il revendique aussi le monopole de « créatrices de richesses ».
_ Cette arrogance ne trouve guère confirmation dans un dispositif démocratique de représentativité : les élections y sont moins suivies que chez les salariés et ont sait aussi que l’appartenance « cotisante » y est des plus floues.
_ Les 942 branches professionnelles rendent la lisibilité de la représentativité à tout le moins difficiles. Le rapport Combrexelle se propose d’en réduire le nombre. Mais il demeure très emprunté quant à une définition claire des seuil de représentativité.

Quant à l’Economie sociale alors que le rapport Combrexelle pouvait être le moyen d’affirmer sa représentativité avec les autres interlocuteurs de ce que l’on appelle faute de mieux le « Hors champ » (FNSEA, UNAPL) elle se retrouve une fois de plus marginalisée.
En 2002, l’ADES, qui ne regroupait qu’une partie de l’ES, et sans le soutien du CEGES, avait créée la surprise avec plus de 9% des suffrages patronaux aux prud’homales.
_ En 2008, avec le CEGES, mais sans la majorité du mouvement coopératif fidèle à des alliances professionnelles avec le MEDEF et sans le secteur agricole, l’ADES obtint une confirmation éclatante de son influence avec plus de 19% des suffrages.
_ Sans doute ces deux scrutins ont-ils conduit le patronat et une partie des pouvoirs publics à chercher des alternatives à ces modes démocratiques.

Toujours est-il que les mouvements d’Economie sociale doivent s’attendre, en contradiction avec la loi Hamon, à se trouver associées, à la marge, par des biais aux négociations nationales et de branches et aux avantages qui y sont liés.
Ce sont des questions auxquelles sont confrontées les organisations d’employeurs de l’ES (UDES, UNIFED, GOEES…). Se contenteront-elles de ces demi-mesures?

Mais faut- il vraiment s’en étonner dans la conception actuel de la contractualisation sociale ? devant le faible engagement des organisations syndicales ouvrières vis-à-vis d’un entreprendre autrement qui permettrait dans le cadre d’alliances nouvelles à envisager des réponses aux crises actuelles comme le propose le texte de la CRESS Bretagne face au mouvement patronal des bonnets rouge et aux confusions qu’il emporte ?

Encore une occasion ratée !

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