Le retour de l’ordre moral

Les manifestants réunis à Paris ce 26 janvier sont absolument contre : les gays, l’avortement, l’euthanasie, les étrangers, les juifs, l’art qu’ils jugent « dégénéré » et, surtout, les socialistes au pouvoir.

Ingrid Merckx  • 30 janvier 2014
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Hollande « l’anti-France ». On entendrait presque « l’antéchrist » dans cette fronde « anti-gouvernement-Hollande » lancée par ce que le pays fédère aujourd’hui de plus conservateur et réactionnaire, voire fascisant, sous la bannière « Jour de colère ». Les manifestants réunis à Paris ce 26 janvier sont absolument contre : les gays, l’avortement, l’euthanasie, les étrangers, les juifs, l’art qu’ils jugent « dégénéré » et, surtout, les socialistes au pouvoir. Lesquels en deviendraient presque héroïques d’oser défendre encore l’égalité des droits avec le mariage pour tous – décidément le catalyseur – et l’extension du droit à l’avortement avec la loi sur l’égalité femmes-hommes en discussion à l’Assemblée. Bientôt le congé parental partagé avec les pères ? L’euthanasie ? Ce qui réveille les partisans de l’ordre moral aujourd’hui, c’est la hantise de ce qu’ils nomment un changement de civilisation, dont la famille serait la première victime. Fini le « bon père de famille », « l’enfant à naître », « un père + une mère »  ! Derrière la défense d’un modèle canonique et hétérosexuel s’exprime la nostalgie d’un ordre patriarcal tel que l’a rêvé l’Action française. D’où un slogan ressorti des greniers moisis : « Travail, famille, patrie ». Mais pas seulement par des anciens : ce sont des jeunes catholiques qui ont adressé une « supplique au pape » pour lui faire part de leur « malaise ». Ce sont des jeunes mères « féminines », et surtout pas féministes, qui militent ici pour un retour à la « nature profonde de la femme ». Mais ce sont aussi 85 % de citoyens qui sentiraient la France décliner. De quoi faire les choux gras du FN ou d’organes comme Valeurs actuelles. Au-delà du cri du petit Blanc effrayé par le changement, c’est tout un climat qui transpire, jusque sur les bancs de la gauche gouvernementale, qui ne se montre pas toujours téméraire – comme en témoigne l’abandon de la PMA ou de la gestation pour autrui. Il faudrait pourtant passer à la contre-offensive. Mais une société ne se soigne pas sans politique sociale.

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