Immense Jean Zay (À flux détendu)

Dès l’annonce des panthéonisés, l’extrême droite a obéi à son réflexe pavlovien antisémite.

Christophe Kantcheff  • 27 mars 2014 abonné·es

Il fut radical de gauche, parlementaire sous la IIIe République et ministre du Front populaire, avant d’être le premier condamné politique du régime de Pétain en 1940, assassiné par les miliciens en 1944. François Hollande l’a désigné, avec Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz et Pierre Brossolette, comme l’un des quatre résistants dont les cendres seront transférées au Panthéon.

Mais savait-on que le nom de Jean Zay était encore si sulfureux ? Dès l’annonce des panthéonisés, l’extrême droite, de Gollnisch à Rivarol, a obéi à son réflexe pavlovien antisémite. Ce Juif Jean Zay ? Pas possible ! Mais le cercle ranci de ceux qui contestent ce choix s’est ensuite élargi à une quarantaine d’organisations, des militaires majoritairement en retraite.

En cause, un texte écrit par le jeune Zay à 19 ans dans lequel il dit des morts de la Grande Guerre qu’ils sont tombés pour « cette immonde petite guenille […] de la race vile des torche-culs ». De son vivant, Jean Zay s’est maintes fois expliqué sur ces propos que certains « vrais » Français lui reprochaient déjà. Pour ma part, j’aime qu’un jeune homme fougueux et brillant ait écrit ces mots sur la boucherie de 14.

On lui conteste aussi son statut de résistant. Au mépris des faits. Zay, de sa prison sous Vichy, ayant été en relation avec des organisations résistantes. En réalité, c’est la personnalité visionnaire et l’œuvre profondément démocratique de cet homme politique qui dérange encore aujourd’hui. Que ce soit sur l’enseignement, où il a notamment favorisé les pédagogies novatrices, ou en ce qui concerne la jeunesse, les sports, la recherche ou les activités artistiques, le ministre a toujours œuvré à destination du plus grand nombre. Il a aussi posé les bases du CNRS, du musée de l’Homme, du Festival de Cannes et envisagea une réforme révolutionnaire du droit d’auteur. Immense et toujours subversif Jean Zay.

Culture
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