Maire, genre masculin

Le bilan chiffré de la parité cache la persistance des inégalités.

Pauline Graulle  • 6 mars 2014 abonné·es

Quinze ans après les premières lois sur la parité, quel bilan tirer de la féminisation de la vie politique municipale ? À première vue, la loi du 6 juin 2000 imposant l’alternance sur les listes aux élections municipales pour les communes de plus de 3 500 habitants a atteint son but : en 1995, un conseiller municipal sur cinq était une femme ; en 2008, elles étaient 48 %. Mais, à défaut d’être désignées têtes de liste, les femmes ne sont maires que de 14 % des communes françaises et d’une demi-douzaine de grandes villes – Lille, Montpellier, Aix, bientôt Paris… Depuis l’an dernier, la loi sur l’égalité hommes-femmes contraint désormais les communes de plus de 1 000 habitants à respecter des listes paritaires. En attendant le rodage, ces nouvelles règles posent, paradoxalement, des problèmes démocratiques : dans certaines communes (souvent très rurales), faute de candidates, on ne peut créer de listes d’opposition. C’est qu’entre la loi et la réalité, il y a parfois un monde. Michel Koebel vient de le montrer dans une étude [^2] sur les adjoints de 79 villes moyennes. Le sociologue note, par exemple, que le taux de féminisation dans les premiers rangs d’adjoints est plus élevé chez les maires PS (43 % pour les deux premiers adjoints) que chez les maires UMP (30 %). Mais aussi que « la plupart des attributions les plus élevées dans la hiérarchie municipale sont massivement confiées à des hommes », et qu’à l’inverse « les attributions les moins convoitées sont confiées majoritairement à des femmes ». Elles sont aussi le plus souvent « associées, dans les représentations communes, à la féminité ». Aux femmes la petite enfance, l’éducation et le social ; aux hommes les finances, l’urbanisme et le sport (voir graphique).

Même lorsque le maire est une femme, « l’attribution des rôles va plutôt dans le sens du renforcement de la domination masculine parmi les postes d’adjoints les plus importants », observe Michel Koebel. Un genre de syndrome de Stockholm ? Plutôt une autre conséquence de la loi sur la parité : « Quand le maire est une femme, le premier adjoint est sept fois sur huit un homme, alors que, lorsque le maire est un homme, deux tiers des premiers adjoints sont également des hommes ». Autrement dit, les femmes respectent plus scrupuleusement les règles de la parité que les hommes. Même quand elle se fait à leurs dépens !

Illustration - Maire, genre masculin

[^2]: Le Poids des hiérarchies dans le choix des adjoints des villes moyennes françaises , Michel Koebel, métropolitiques.eu, 20 janvier 2014.

Société
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