La gauche anti-austérité unie contre le « liberal killer » Macron

La gauche « de gauche » était rassemblée, ce mardi soir, pour un meeting unitaire afin de dénoncer la loi Macron, qui arrivait, le même jour, au Sénat.

Pauline Graulle  • 8 avril 2015
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La gauche anti-austérité unie contre le « liberal killer » Macron

La loi Macron passe en deuxième lecture au Sénat. Et la gauche « de gauche » n’entend pas demeurer silencieuse. Jean-Luc Mélenchon, Olivier Besancenot, Clémentine Autain, Gérard Filoche… Mais aussi la juge Evelyne Sire-Marin, Laurent Degousé (de SUD Commerce) ou Jean-Baptiste Eyrault (du DAL). A deux jours de la grève du 9 avril où ils espèrent rassembler des centaines de milliers de personnes, les principaux animateurs des courants politiques, associatifs et syndicaux « anti austérité », se réunissaient, mardi soir, devant quelque 400 convaincus, au gymnase Japy (Paris 11e), à l’initiative du Collectif AAA (Alternative A l’Austérité).

A la tribune, on n’a pas eu de mots assez durs pour dénoncer cette loi, « coup porté au monde du travail » , « une absurdité, un anachronisme » , a estimé, en introduction, Olivier Dartigolles, numéro 2 du PCF. Le socialiste Gérard Filoche a tenté, en dépit des cinq minutes chrono imparties à chaque intervenant, de revenir sur quelques uns des 106 articles de ce texte « aussi dur à lire que le Traité Constitutionnel Européen » , afin de montrer comment, du travail du dimanche à la suppression de la référence au lien de subordination entre l’employeur et l’employé, il détricotait « un siècle de droit du travail » . « Ce qu’on fait ce soir, c’est le travail de TF1, France 2 et France 3 réunis » , a lancé l’ancien inspecteur du travail qui, depuis des semaines, s’emploie à faire l’exégèse de la loi Macron dans les salles communales de France et de Navarre…

### Macron bashing

_ Sagement assis entre Martine Billard et Eric Coquerel, et non loin du journaliste Daniel Mermet, Jean-Luc Mélenchon a écouté, sans mot dire, pendant près de deux heures, les interventions. Le ministre de l’Economie, dont l’admiration pour Thatcher a été maintes fois raillée à la tribune, en a pris pour son grade. « Macron, c’est le renard libre dans le poulailler plein ! » , a lancé Malika Zediri, au nom des associations des chômeurs et précaires. Le « liberal killer Emmanuel Macron » représente la « nouvelle noblesse d’Etat, qui ne connaissent pas notre monde » , a ajouté Eric Coquerel, du Parti de gauche.

Comparant Alexis Tsipras « qui résiste à la loi d’airain du capitalisme financiarisé » et François Hollande « qui a capitulé depuis longtemps » , le conseiller régional d’Ile-de-France a emprunté aux accents du Podemos ! : « Il faudra un jour que Valls et Hollande rendent des comptes sur ce qu’on peut qualifier de trahison envers l’intérêt des peuples et de la nation [parce qu’en réalité, ils] défendent l’intérêt de leur caste, de l’oligarchie financière » .

Ce gouvernement, « il ne pense plus ; il compte » , a enchaîné Clémentine Autain, d’Ensemble !. « Ce qui est en train de se passer à Radio France le montre. A la casse sociale, s’ajoute le mépris pour la culture et l’information de qualité » . Et d’évoquer l’ « effet de sidération considérable dans le pays » provoqué par cette gauche « qui n’est plus la gauche » .

### Vers un « CPE » bis ?

_ Comme une réponse à Olivier Dartigolles appelant à de « grandes convergences syndicales, politiques [afin de] reconstruire l’imaginaire de gauche » , le « socialiste affligé » Liêm Hoang Ngoc a estimé que « ce meeting est un petit événement politique. Une grande partie du mouvement social et syndical, le Front de gauche uni, les socialistes et Verts de conviction [représentés à la tribune par Jérôme Gleizes, de l’aile gauche d’EELV, NDLR], sans oublier Olivier [Besancenot] sont côte à côte dans cette salle » .

Ce dernier, galvanisant la salle un peu clairsemée de la fin de soirée, a rappelé à raison que la loi « n’est pas encore passée »« A l’époque du CPE , a poursuivi le porte-parole du NPA, on bégayait pas, parce que c’était la droite. Et quand le PS est aux affaires, on se pose encore des questions… Alors qu’ils agissent à droite, ils parlent à droite ! Au PS, je préférais quand ils avaient oublié la lutte de classe. Car aujourd’hui, ils font la lutte de classes mais dans le camp adverse. » « Le CPE a été abrogé après de grandes mobilisations, ce qui veut dire qu’on peut abroger une loi qui est votée, c’est intéressant pour la loi Macron. » , a glissé Evelyne Sire-Marin, du Syndicat de la Magistrature.

« Cette loi Macron ne passera pas si, après jeudi, nous continuons les manifs, comme en 1995. » , a conclut Willy Pelletier, de la Fondation Copernic, appelant à une réalité « qui cogne » le pouvoir. Et pour une fois, pas les salariés.

Politique
Temps de lecture : 4 minutes
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