Arrestations de migrants : 45 réfugiés menacés d’expulsion

Après la violente arrestation collective de lundi, 38 personnes sont en rétention. La ville de Paris dit faire face à « un flux migratoire sans précédent ».

Erwan Manac'h  • 9 juin 2015 abonné·es
Arrestations de migrants : 45 réfugiés menacés d’expulsion
© Photo : FRANCOIS GUILLOT / AFP

38 personnes ont été enfermées lundi en centre de rétention administrative (CRA) selon le Gisti et l’Assfam qui interviennent sur place. 16 Érythréens et 20 Soudanais sont répartis entre les CRA de Vincennes et du Mesnil-Amelot et 2 Ethiopiennes ont été enfermées au centre de rétention pour femme, au palais de justice de Paris.

7 réfugiés devaient comparaître devant le tribunal administratif de Paris ce mardi à la suite de leur interpellation, samedi, précise également le Gisti. Cela porte à 45 le nombre de personnes menacées d’expulsion après la vague d’interpellations dans le 18e arrondissement de Paris.

  • 16 h 17 :  

    « Certaines personnes ont été interpellées avec des attestations de domiciliation » , preuve qu’ elles avaient engagé des démarches de demande d’asile , témoigne l’Assfam, qui intervient au centre de rétention de Vincennes. Une information qui contredit les affirmations du préfet de police de Paris, qui affirmait lundi qu’aucun des migrants interrogés par la police n’avait souhaité s’engager dans une procédure.

    « Il n’y a pas eu d’examen des situations » après l’interpellation massive, déplore Marie Lindemann, coordinatrice juridique de l’Assfam au CRA de Vincennes.

  • 15 h 19 :

    « La mairie de Paris fait face ces dernières semaines à un flux migratoire sans précédent » , affirme le service de communication de la capitale, joint par téléphone.

La ville a engagé des discussions avec les associations et les services de l’Etat pour « étudier la possibilité d’ ouvrir un lieu d’accueil » exceptionnel, à une date encore inconnue. Il s’agirait de fournir « un effort de pédagogie et renforcer l’information pour les personnes qui souhaitent demander l’asile, car nous nous sommes aperçus que beaucoup de migrants pensent qu’il est impossible de demander l’asile en France quand on ne parle pas le français » , indique la mairie de Paris.

Cette structure pourrait également servir pour « une mise à l’abri temporaire » d’une partie des migrants présents sur la capitale.


Le bilan officiel de l’opération policière, lundi après midi rue Pajole dans le 18e arrondissement de Paris, reste de 84 interpellations « pour but d’identification ».

Lire > Les images de l’opération policière contre des migrants à Paris

Sans nulle part où dormir, une poignée de migrants s’est réunie hier soir sur les lieux de l’interpellation, rapidement chassée par la présence de policiers. L’association Bois Dormoy, qui s’occupe d’un jardin partagé rue Marx Dormoy à proximité de la rue Pajol, a fini par accueillir un groupe de migrants.

Un rassemblement est prévu mardi 9 juin à 18 h devant la halle Pajol, dans le 18e arrondissement de Paris, où a eu lieu l’opération de police.

Inquiétudes et indignation sur l’accueil des migrants en France

Neuf associations et partis politiques ont co-signé lundi un communiqué pour demander une solution d’hébergement pour les migrants d’un autre campement, à l’Est de Paris. À deux pas de la gare d’Austerlitz, plusieurs dizaines de migrants, demandeurs d’asile pour la plupart, vivent dans un campement de fortune.

« Faire preuve d’humanité, ce n’est pas laisser des centaines de migrants dormir dans les rues de Paris en les harcelant pour éviter qu’ils se regroupent quelque part » , affirment les antennes locales d’Attac, la Cimade, la LDH, RESF, EELV, Ensemble, le PCF et le PG.

Les conventions internationales obligent les États à proposer un hébergement le temps de l’examen des demandes d’asile, mais les Centres d’accueil de demandeurs d’asile sont surchargés en France et l’Allocation temporaire d’attente (Ata) prévue pour les réfugiés sans solution d’hébergement est compliquée à débloquer et ne s’élève qu’à 11 € 50 par jour.

  • « L’État dispose de 11 millions de mètres carrés de locaux inoccupés , dont 2 millions en logements » , rappelait mardi l’association Droit au logement dans un communiqué dénonçant un « traitement répressif indigne pour notre pays » .

-Dimanche, un père de famille camerounais était expulsé après un mois en rétention. Samuel Bedime est arraché à deux enfants : un garçon de 3 ans né en Espagne et une fillette de 10 jours, née en France. Le collectif RESF, qui n’a pas pu empêcher cette expulsion, annonce son intention de continuer à se battre pour obtenir le retour de Samuel Bedime.

-La situation reste particulièrement difficile à Calais où près de 3 000 migrants espèrent embarquer vers l’Angleterre . La préfecture de police a annoncé mardi des renforts policiers, portant à 250 le nombre de policiers et gendarmes présents sur place.

Calais, le 4 mai 2015. - AFP PHOTO / PHILIPPE HUGUEN

-Plus de 100 000 migrants et réfugiés sont arrivés en Europe depuis le début de l’année via la Méditerranée, a indiqué mardi le porte-parole du Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies. Le week-end des 6 et 7 juin, ce sont près de 6 000 personnes qui sont arrivées dans le sud de l’Italie au péril de leur vie.

Arrivées de migrants par pays depuis janvier :

Selon l’Organisation internationale pour les migrations, environ 1 770 hommes, femmes et enfants sont morts ou disparus en tentant la traversée de la Méditerranée depuis le nord de l’Afrique et le Proche Orient.

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