« Cendres », d’Idrissa Guiro et Mélanie Pavy : Absente au monde

Entre Paris et le Japon, une réflexion sur la disparition.

Jean-Claude Renard  • 10 juin 2015 abonné·es
« Cendres », d’Idrissa Guiro et Mélanie Pavy : Absente au monde
Cendres , d’Idrissa Guiro et Mélanie Pavy (1 h 14), en salles depuis le 10 juin.
© Simbad Films

Juste une mère qui se retire, comme un continent englouti. Kyoko, japonaise, incinérée au Père-Lachaise, qui lègue son héritage à sa fille, Akiko, résidant au Japon. Cet héritage tient en quelques calepins, des journaux intimes entamés en mai 1965. C’est peu dire qu’avec cette disparition tout les sépare. Reste à la fille à faire le voyage pour rapporter les cendres maternelles parmi les siens. À la mort d’une mère, élément universel, Idrissa Guiro et Mélanie Pavy ajoutent dans Cendres une autre universalité : l’itinéraire d’une femme qui entend vivre son indépendance (et sa féminité) dans un Japon encore marqué par Hiroshima. Une femme qui vibre aux révoltes de 1968, se voit en personnage de la Nouvelle Vague. Parce que, justement, Kyoko n’a pas été qu’une femme éprise de liberté. Elle a été l’égérie de Pierre-Dominique Gaisseau, documentariste dans les années 1960 et 1970.

L’occasion alors pour Idrissa Guiro et Mélanie Pavy d’injecter des images d’archives, renforçant cette impression de va-et-vient dynamique entre le passé et le présent. Les réalisateurs ont su éviter le pathos, sans s’épargner une pointe d’humour quand il s’agit d’ouvrir l’urne devant la famille. Parenthèse dans la déchirure. Parce que, in fine, voyageant entre les temps et les cultures, cette histoire universelle se fait bousculer par l’intime. Akiko n’a que très peu connu sa mère. Pour ainsi dire, elle ne la connaît que de profil. Un ratage que les journaux intimes pourront difficilement rattraper. À moins qu’ils ne remplissent cette misérable « absence au monde ».

Cinéma
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