Rapport sur les pollutions mortelles: les sénateurs sortent de leur profond sommeil habituel pour écrire ce que chacun sait depuis des années…

Claude-Marie Vadrot  • 18 juillet 2015
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Les parlementaires français, à commencer par les sénateurs, ont un talent inégalé pour enfoncer les portes ouvertes. Depuis au moins les années 70, les associations de protection de l’environnement, les groupes de protection de la nature et une majorité de scientifiques spécialistes de la santé et ceux qui surveillent l’état du pays expliquent en vain que les pollutions sont dangereuses pour la santé des Français et entrainent de ruineuses dépenses pour le pays et les budgets de la Sécurité sociale. Avertissements qui se succèdent, rapports après études, dans un profond silence et surtout sans que des mesures soient appliqués. L’actuelle ministre de l’Ecologie, après bien d’autres, n’a pas failli à la règle en décrétant qu’elle allait prendre des mesures. Comme une nouvelle tentative de faire oublier aux électeurs que son ministère s’oppose régulièrement, pour ne rendre qu’un seul exemple, à la circulation alternée dans les grandes agglomérations en cas de pics de pollution et qu’il s’obstine à hisser le taux des taxes frappant le diesel au même niveau que celles de l’essence.

En chiffrant les dégâts multiples des pollutions à une centaine de milliards d’euros par an, les sénateurs qui viennent de faire semblant de découvrir le problème, oubliant simplement que pour faire rapidement baisser la facture et diminuer les dangers, il suffirait d’appliquer non pas « la » loi mais toutes les lois (sur l’air, sur l’eau, sur l’agriculture, sur les transports ou sur l’industrie) votés en catastrophe à chaque fois qu’un dégât de la pollution fait un passage remarqué dans l’actualité.

En promettant des « mesures pour la semaine prochaine » , la ministre de l’environnement joue également les autruches en feignant d’ignorer qu’il existe donc en France un important dispositif réglementaire et législatif qu’il suffit de mettre en œuvre. Tout comme, autre exemple, tous les textes sur la protection de la biodiversité que le Sénat et l’Assemblée nationale trainent à rassembler dans une loi cohérente et efficace depuis trois ans. Un texte que le Sénat qui cherche à se faire remarquer lorsqu’il sort de sa léthargie, vient de mettre en pièces, articles après articles. Au point que si la nouvelle loi était adoptée dans son état actuel, elle serait encore moins efficace que les règlements actuels.

Mais le problème que feignent d’ignorer les parlementaires et la ministre de l’Ecologie qui juge que l’écotaxe est « punitive », c’est que devant chaque niche de pollution veillent des chien de garde attentifs à ce que, surtout, rien de change, rien ne s’améliore et que les profits du non-respect de la santé et de l’environnement puissent se poursuivre. Qu’il s’agisse du trafic routier, véhicules individuels ou poids lourds, du dioxyde de souffre, des particules fines, des oxydes d’azote, des causes multiples de décès prématurés (42 000 chaque année), des 650 000 journées d’arrêt de travail annuels (liés aux pollutions) ou des conséquences de l’abus de pesticides ou d’engrais, il y a toujours un groupe de pression pour se dresser contre l’application des lois. Ce sont tous ces gens là, souvent déguisés en mécènes de la prochaine Conférence de Paris sur le climat, qui luttent, nationalement et internationalement, pour que les mesures contre le dérèglement climatique soient sans arrêt remises à une prochaine conférence. Après eux, le déluge…

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