Le PC fait de la résistance

Les communistes contestent toujours les conditions imposées pour parvenir à des listes régionales de large union.

Erwan Manac'h  • 2 septembre 2015 abonné·es
Le PC fait de la résistance
© Photo : Erwan Manac’h

À trois mois des élections régionales, le Parti communiste s’est réuni du 28 au 30 août, comme chaque année, en surplomb de la vallée de la Maurienne, dans la station des Karellis (Savoie), pour son université d’été. Le ciel est au beau fixe, mais les esprits sont pessimistes. Peu audible dans les médias, désorienté par l’échec de Syriza en Grèce, en désaccord larvé avec ses « partenaires » du Front de gauche : le PCF est guetté par le repli sur soi, et les appels des militants au « renouveau » peinent à faire dévier la trajectoire de l’appareil.

Les discussions avec les partis de gauche, EELV compris, et les mouvements citoyens qui ont émergé ici ou là restent ouvertes jusqu’à la fin du mois de septembre, mais les échanges d’amabilités qui ont ponctué la rentrée politique augurent mal d’un rassemblement large : « La ligne d’EELV n’est pas d’une limpide clarté, raille Pierre Laurent, secrétaire national du PCF. Ils ne font aucune concession et nous proposent un accord totalement déséquilibré », dénonce-t-il, après l’arrêt des discussions en Rhône-Alpes-Auvergne, seule région qui semblait gagnable pour une large coalition de « l’autre gauche ». Le PCF, quant à lui, refuse de signer une « charte éthique » et d’appliquer le principe du non-cumul des mandats, condition imposée par le rassemblement de partis (EELV, PG, Ensemble !, Nouvelle Donne) et de mouvements citoyens qui sort galvanisé de sa victoire aux municipales à Grenoble en 2014, contre une liste PS-PCF. Les dirigeants communistes dénoncent aujourd’hui une « charte anti-éthique et artificielle », « un habillage politicien » calibré selon eux pour exfiltrer leurs deux chefs de file, Cécile Cukierman et André Chassaigne, sénatrice de la Loire et député du Puy-de-Dôme. Dans un petit amphithéâtre bondé, André Chassaigne anime justement, le 28 août, un atelier sur le renouveau des pratiques politiques. Après une longue introduction sur la « crise politique extrêmement grave […] qui a fracturé les consciences », le parlementaire ébauche des solutions (exemplarité des élus, travail de terrain) et dresse un constat douloureux : « Nous n’y arrivons pas. Il y a des blocages. Or, si nous n’appliquons pas la démocratisation, nous sortirons considérablement affaiblis », déplore-t-il.

L’élu livre aussi un aveu implacable : « Sur les 7 députés communistes, 5 ont également un mandat de maire. Marie-George [Buffet] et moi, qui ne sommes pas maires, nous nous épuisons pour essayer d’être présents dans les débats. Nous sommes surchargés de travail. Nous avons beaucoup de mal à être à la hauteur », s’excuse-t-il presque. Malheureusement, « nous sommes obligés de présenter des camarades qui sont maires pour sauver les sièges ». Sur le fond, les désaccords sont réels avec EELV : le PCF refuse de condamner par principe le nucléaire, il soutient certains grands projets jugés inutiles par EELV, comme la ligne ferroviaire Lyon-Turin ou le Center parcs de Roybon (Isère). Le rassemblement en Rhône-Alpes refuse que les élus PCF constituent un groupe à part au sein de la future assemblée régionale, tandis que le PCF veut garder la main sur l’activité de ses élus. Le rassemblement s’en remet au vote d’une assemblée populaire pour toute alliance de second tour avec les socialistes, principe que le PCF tient pour acquis.

Le dialogue est aussi désaccordé avec le Parti de gauche. Non seulement à cause de l’agacement de plus en plus palpable que Jean-Luc Mélenchon suscite à tous les étages du Parti communiste, mais également concernant l’analyse qu’il porte sur le dossier grec. « L’heure est propice aux donneurs de leçons qui adulaient Syriza et Tsipras hier et les repeignent aujourd’hui au mieux en naïfs, au pire en capitulards », tonne Pierre Laurent en clôture de l’université d’été. Une attaque à peine voilée envers le Parti de gauche, qui appelle à la réunion des forces de la gauche européenne pour un « sommet du plan B », avec notamment l’Unité populaire, une dissidence de Syriza, et l’ex-ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis, en rupture avec Alexis Tsipras. « Il n’y a pas d’échec définitif d’Alexis Tsipras, car nous sommes au début de la lutte », juge Isabelle de Almeida, présidente du conseil national du PCF. Contre tout « plan B », le PCF promeut désormais une «  Europe à géométrie choisie  » permettant la mise en place de politiques sociales sans avoir à impliquer les 27 États membres. Le PCF participera samedi 5 septembre à la réunion de la « vague citoyenne », alliant partis et assemblée citoyenne, pour discuter d’une candidature unitaire en Aquitaine. « Il n’est pas trop tard », disait dimanche Pierre Laurent, qui croit officiellement en la possibilité d’accords locaux. «  Mais les jours sont comptés.  » Et les chances de réussir sont minces.

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