Les lourdes ambiguïtés de François Hollande

Personne n’en sera étonné. le chef de l’Etat, fidèle à lui-même, a cultivé l’ambiguïté sur les quatre grands sujets abordés au cours de sa conférence de presse de ce matin.

Denis Sieffert  • 7 septembre 2015 abonné·es
Les lourdes ambiguïtés de François Hollande
© Photo: PHILIPPE WOJAZER / POOL / AFP

Ambiguïté sur la question de l’accueil des réfugiés. S’il a annoncé que la France accueillerait 24.000 réfugiés en deux ans, conformément à un mécanisme européen, il a laissé plané le doute sur les critères de sélection des migrants accueillis. Il a parlé de « contrôles aux frontières de l’Europe » dans des « centres d’identification » qui devront « distinguer entre ceux qui relèvent du droit s’asile et ceux qui doivent être reconduits avec humanité » . Mais la définition qu’il a proposée du « droit d’asile » apparaît bien restrictive : « Tout homme persécuté en raison de son activité pour la liberté. » Ce qui écarte les victimes de la grande pauvreté, mais aussi de l’oppression. Ambiguïté aussi sur l’attitude de l’Union européenne à l’égard des pays membres qui refuseraient de prendre leur part à l’accueil des réfugiés, s’en tenant à la « menace » d’une convocation du Conseil de l’Europe. Envisage-t-on des sanctions ? Une exclusion ? Mystère.

Ambiguïtés à propos de la Syrie. François Hollande a annoncé « dès demain » des « vols de reconnaissance » pour identifier les positions de Daech, mais il a laissé dans le flou « les décisions » qu’il aurait à prendre « ensuite » . Au passage, il a indiqué que le Parlement serait « informé » sur l’engagement de la France. Mais informer n’est pas consulter. On n’en sait pas plus sur les objectifs de cet engagement. S’agit-il d’une réponse à la question des réfugiés ? S’agit-il de la lutte contre le terrorisme ? François Hollande a semblé confondre les deux problèmes. Pour servir cette confusion volontaire, le président de la République a affirmé que « Daech fait fuir des milliers de familles » , oubliant que l’immense majorité des migrants fuient les bombardements des villes par Bachar Al-Assad. Il a tout de même été amené à préciser, en réponse à une question, que « rien ne doit être fait qui consolide le pouvoir de Bachar Al-Assad » dont, a-t-il dit, « le départ se pose à un moment ou un autre » .

François Hollande a préservé l’ambiguïté aussi sur la réforme du code du travail. « Toute la place nécessaire , a-t-il dit, sera donnée aux accords d’entreprise. » Dite ainsi, la chose peut paraître positive. Les acteurs sociaux savent déjà que cette formule couvre une réalité plus inquiétante : le démantèlement du code du travail.

Ambiguïté, enfin, sur la présidentielle de 2017. Participerait-il à une « primaire » à gauche » ? « Je n’ai pas à me mettre dans une procédure qui n’a même pas été décidée par les partis » , a-t-il répondu à une question. On ne saura donc pas si c’est là un refus définitif ou s’il juge seulement la question prématurée.

Sur la forme, François Hollande a lourdement insisté sur son aptitude à « faire des choix ». Il en a fait le fil rouge de son discours. Comme une difficile entreprise de rectification d’image… Au total, on a eu l’impression, comme toujours, d’un pur exercice de communication dont l’objectif serait… d’en dire le moins possible.

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