Expulsion du lycée Jean-Jaurès : « Le gouvernement a voulu afficher sa fermeté »

Très tôt ce mercredi matin, les 277 migrants qui occupaient un lycée parisien ont été évacués. Éric Coquerel, conseiller régional et coordinateur du Parti de gauche, y était.

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Expulsion du lycée Jean-Jaurès : « Le gouvernement a voulu afficher sa fermeté »

Dans la nuit du 21 au 22 avril, une centaine de migrants ont investi un ancien lycée parisien après avoir été expulsés de leur campement sous la station de métro aérien Stalingrad. Il y a deux jours, une énième évacuation a de nouveau contraint deux cent autres migrants à rejoindre ceux qui avaient trouvé refuge dans l’établissement quelques jours auparavant. Ce matin, tôt dans la matinée, les forces de l’ordre sont intervenues.

Comment s’est passée l’expulsion des migrants qui occupaient le lycée Jean-Jaurès ?

Éric Coquerel : Nous avions appris hier soir que la police devait arriver ce matin pour les déloger. Aux alentours de 5h du matin, près de deux cent personnes se sont réunies devant le lycée afin de soutenir les réfugiés. Certaines personnes étaient aussi à l’intérieur du bâtiment. L’idée n’était pas de tenir un siège, mais de retarder l’évacuation, et si possible de l’éviter de manière non violente. Mais rien n’a été possible. Depuis dix jours que nous soutenons ces migrants chassés de Stalingrad, les autorités n’ont pris aucun contact avec les associations, ni avec les syndicats, ni même avec les élus, ne serait-ce que pour gérer les choses…

Les forces de l’ordre ont-elles usé de la force pour permettre l’expulsion ?

Les gendarmes sont arrivés et, sans sommations, ont chargé en nous lançant des grenades lacrymogènes. Ils sont ensuite entrés par devant et par derrière le bâtiment. Nous étions en chaîne de solidarité. Il y a aussi eu des coups de matraque pour la défaire. Mais ce qui m’a véritablement surpris ce matin, et qui semble être dans l’air du temps, c’est que le gouvernement a voulu afficher une fermeté. Il y a différentes manières de gérer une expulsion, mais ce matin, l’État a utilisé la police sans ménagement. En tant qu’élu, et c’est une première, je n’ai pas pu entrer en discussion avec les gens de la préfecture, ou voir comment les choses étaient gérées. Les soutiens qui étaient avec les réfugiés dans le lycée ont même été évacués. De fait, la police s’est retrouvée toute seule avec les migrants. Nous n’avons rien pu voir. Tout s’est fait de façon opaque et assumée. Et je précise qu’il n’y a eu aucune violence de la part des manifestants.

Savez-vous où ont été emmenés les migrants ?

Je ne sais pas où ils sont allés. Mais nous avions reçu des informations disant qu’ils risquaient d’être dispersés dans différents commissariats. Si c’est le cas, ça veut dire que, comme nous le craignions déjà hier, il n’y a pas de solutions d’hébergements et d’accueils envisagées pour l’instant et dans ces cas-là, le pire est à craindre. Surtout si les réfugiés doivent se rendre dans des centres de rétention.

NB : Selon la préfecture de police de Paris, 74 personnes (dont 20 femmes et 6 enfants) « ont été mises à l’abri et conduites vers un centre d’hébergement » et plus 200 autres « ont été prises en compte afin d’examiner leur situation administrative », assurant que « toute personne en situation régulière ou régularisable fera l’objet d’une mise à l’abri suivie d’un hébergement dans la journée ».

Société Politique
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