Royaume-Uni : L’un chante, l’autre pas

Le Brexit pourrait ouvrir une course au dumping.

Denis Sieffert  • 13 juillet 2016
Partager :
Royaume-Uni : L’un chante, l’autre pas
© Photo : Kate Green/ANADOLU AGENCY/AFP

On le trouverait presque primesautier, David Cameron, surpris par un micro oublié à fredonner tandis qu’il s’éloigne des caméras, et s’apprête à franchir une dernière fois la porte du 10 Downing Street. C’était lundi, et le Premier ministre démissionnaire venait d’annoncer à la presse son remplacement par Theresa May (photo). Une passation de pouvoir qui intervient plus vite que prévu après le renoncement de la principale concurrente de Theresa May au sein du Parti conservateur. Libéré de toute cette pagaille qu’il a lui-même créée, Cameron lègue une situation ingérable à son ancienne ministre de l’Intérieur, qui, elle, n’est pas du genre à chanter.

Cette fille de pasteur anglican passe plutôt pour une personnalité austère. Devant le Parlement, elle a sobrement résumé son programme : « Brexit veut dire Brexit. » Un message à l’attention de tous ceux qui espéraient que la décision des électeurs britanniques de rompre avec l’Union européenne serait finalement contournée. Certains y croyaient d’autant plus que la nouvelle Première ministre, entrée en fonction mercredi, était favorable au maintien dans l’Union. Mais on entre tout de même dans une longue période d’incertitude. Le plus probable est que le Royaume-Uni signe avec l’Union européenne un maximum d’accords bilatéraux qui, quoi qu’en dise Theresa May, atténueront les effets du Brexit. Le doute persiste pour la suite.

Sur le continent, le discours opportuniste est à la mode. La City connaissant une crise de confiance, il s’agirait d’attirer les financiers dans d’autres capitales. Paris est sur les rangs. S’exprimant le 6 juillet devant le forum Europlace, organe de promotion de Paris en qualité de « place financière », Manuel Valls a annoncé une nouvelle série d’exonérations fiscales pour les banques. Mais le Royaume-Uni de Mme May n’a pas l’intention de se laisser dépouiller. Alors que le Premier ministre français annonce une baisse de l’impôt sur les sociétés de 33 à 28 %, le ministre britannique de l’Économie, George Osborne, a annoncé sa volonté de baisser cet impôt à 15 %, voire moins. On devine ce qui risque de se profiler au détriment des peuples. Une sorte de surenchère libérale dans laquelle il est peu probable que la France ait le dernier mot. Certains prêtent même aux dirigeants britanniques l’intention de glisser vers une sorte de paradis fiscal qui exercerait une terrible pression sur les économies européennes. Une véritable course au dumping.

Monde
Temps de lecture : 2 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Yassin al-Haj Saleh : « Le régime syrien est tombé, mais notre révolution n’a pas triomphé »
Entretien 2 juillet 2025 abonné·es

Yassin al-Haj Saleh : « Le régime syrien est tombé, mais notre révolution n’a pas triomphé »

L’intellectuel syrien est une figure de l’opposition au régime des Assad. Il a passé seize ans en prison sous Hafez Al-Assad et a pris part à la révolution en 2011. Il dresse un portrait sans concession des nouveaux hommes forts du gouvernement syrien et esquisse des pistes pour la Syrie de demain.
Par Hugo Lautissier
Au Chili, un espoir pour la gauche
Analyse 1 juillet 2025 abonné·es

Au Chili, un espoir pour la gauche

Dimanche 29 juin, la candidate du Parti communiste, Jeannette Jara, a emporté haut la main les primaires de gauche. Elle représentera la coalition de centre-gauche Unidad por Chile à l’élection présidentielle, en novembre prochain. Un défi important dans un contexte de droitisation du continent sud-américain.
Par Marion Esnault
Contre la guerre, aux États-Unis : « Nous ne voulons plus de morts, plus de victimes »
Reportage 27 juin 2025

Contre la guerre, aux États-Unis : « Nous ne voulons plus de morts, plus de victimes »

Des rassemblements sont organisés depuis une semaine aux États-Unis contre l’attaque américaine en Iran. Si la taille des manifestations reste minime, l’opposition à l’intervention américaine est forte dans la population, y compris chez certains soutiens de Donald Trump.
Par Edward Maille
« Le fracas des bombes ne réduira jamais au silence les sociétés »
La Midinale 27 juin 2025

« Le fracas des bombes ne réduira jamais au silence les sociétés »

Aghiad Ghanem, docteur en relations internationales à Sciences Po, co-auteur de Espace mondial aux Presses de Sciences Po, est l’invité de « La Midinale ».
Par Pablo Pillaud-Vivien