Roumanie : La mobilisation continue

Près de 500 000 personnes manifestaient encore dimanche à Bucarest et dans les grandes villes du pays.

Hugo Boursier  • 8 février 2017
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Roumanie : La mobilisation continue
© Photo : Daniel MIHAILESCU/AFP

Pour la sixième journée consécutive de rassemblements contre un texte qui affaiblit la lutte anti-corruption, près de 500 000 personnes manifestaient dimanche à Bucarest et dans les grandes villes de Roumanie. Une mobilisation considérable pour ce pays de 20 millions d’habitants. La décision prise la veille par le Premier ministre social-démocrate (PSD), Sorin Grindeanu, d’abandonner ses « projets d’ordonnance d’urgence », sans la participation du Parlement et des autorités compétentes, n’a visiblement pas convaincu les citoyens. Les deux décrets à l’origine de la contestation visaient à réduire les peines pour abus de pouvoir, à instaurer un seuil minimum de préjudice pour entreprendre certaines poursuites judiciaires, et à appliquer une grâce totale pour les condamnations inférieures à cinq ans de prison… Des mesures qui affaibliraient la lutte contre la corruption, toujours prégnante en Roumanie, et favoriseraient notamment le président du PSD, Liviu Dragnea.

Après la victoire de son parti aux législatives en décembre, Liviu Dragnea avait été choisi pour devenir Premier ministre. Mais sa condamnation à deux ans de prison avec sursis pour fraude électorale avait poussé le Président roumain, Klaus Iohannis, à rejeter sa candidature. Son remplaçant à la tête du gouvernement, Sorin Grindeanu, est considéré par les médias comme le « bras droit obéissant » de M. Dragnea.

Les pressions de la rue, des ambassades européennes, mais aussi du procureur général et du parquet anti-corruption, ont donc poussé M. Grindeanu à revenir sur ses intentions. Samedi soir, il annonçait vouloir « abroger ce décret », pour ne pas « diviser la Roumanie ». Son ministre de la Justice, Florin Iordache, a annoncé qu’un projet de loi prenant en compte les revendications des manifestants allait être proposé au Parlement.

Une décision qui ne rassure pas les citoyens. Sur les réseaux sociaux, les appels à la démission du gouvernement se sont multipliés, notamment sur la page Facebook « Coruptia Ucide » (« la corruption tue »), créée après l’incendie d’une discothèque, le Colectiv, en 2015, qui avait fait 63 morts, 150 blessés, et plongé le pays dans une affaire de corruption menant au départ du Premier ministre de l’époque, Victor Ponta. C’est d’ailleurs le créateur de cette page, Florin Badita, qui a lancé les premiers appels à manifester, fin janvier.

Mais le PSD, fort de sa légitimité dans les zones rurales et de son score aux législatives, ne compte pas abandonner le pouvoir aussi rapidement, malgré les prises de position de certains cadres du parti contre ces ordonnances.

Monde
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