Solidarité avec Théo : la mobilisation continue

Des rassemblements ont eu lieu hier pour soutenir Théo, victime de violences policières et d’un viol présumé lors de son interpellation à Aulnay-Sous-Bois le 2 février.

Adrien Monnanni  • 9 février 2017 abonné·es
Solidarité avec Théo : la mobilisation continue
© Photos : Malika Butzbach

C’est un sentiment de colère qui animait hier soir les manifestants venus afficher leur soutien à Théo, ce jeune homme blessé et supposément violé lors d’une interpellation à Aulnay-Sous-Bois le 2 février. Encadrées par un important dispositif policier, plusieurs dizaines de personnes (environ 250 au plus fort de la mobilisation) se sont rassemblées pour la deuxième soirée consécutive devant le métro Ménilmontant à Paris pour protester contre les violences policières et exprimer leur solidarité avec le jeune Aulnaysien.

© Politis

Ariane, une Québécoise installée dans la capitale, tenait absolument à être présente : « Ces actes sont révoltants, nous devons faire bloc pour dénoncer les abus de l’autorité. Et en tant que femme, cette histoire de viol me touche particulièrement », ajoute-t-elle en brandissant une pancarte acerbe, sur laquelle on lit « Please protect my ass ». Chez les jeunes, venus en nombre à ce rassemblement, les discours étaient principalement centrés autour de la méfiance de la police « Ce n’est pas normal d’avoir peur des réactions des flics, ils sont censés être là pour nous protéger ! », argue Titouan, lycéen. « Le problème est bien plus large que l’affaire Théo », renchérit un de ses amis.

Très vite, des slogans hostiles aux policiers retentissent. Devant l’entrée de la station de métro, c’est la question de la responsabilité collective des forces de l’ordre qui anime les débats : « Ce n’est pas un cas isolé, tout le système est violent, allez demander aux jeunes d’Aulnay ce qu’ils vivent au quotidien ! », s’exclame Lætitia, un carton #JusticePourThéo accroché dans le dos. «Cette bavure doit être jugée sévèrement, mais ne faisons pas de généralités ! », rétorque un autre manifestant. En léger retrait de la manifestation, Ludovic, figure emblématique de la chaîne Youtube « Osons Causer », livre son ressenti sur l’affaire avec sa verve habituelle : « C’est important d’être là pour Théo, il ne faut pas que cette affaire soit passée sous silence. À présent, la police doit rendre des comptes et c’est à la justice de faire son travail. »

© Politis

Bien qu’émaillée par quelques incidents, dont des feux de poubelle et la dégradation d’une vitrine de banque, la manifestation s’est terminée dans le calme vers 20h30. Contrairement à la veille, aucune interpellation n’a été effectuée. D’autres rassemblements, plus mouvementés, ont eu lieu dans d’autres villes dans la soirée. À Nantes, la manifestation s’est achevée par des échauffourées et une vingtaine d’interpellations. La formation d’un cortège d’une centaine de personnes à Rennes a quant à elle donné lieu à quelques face-à-face tendus avec les CRS, mais aucun affrontement direct n’a été à déplorer.

Un nouveau rassemblement en soutien à Théo est prévu samedi, devant le tribunal de grande instance de Bobigny.

Une situation tendue dans les banlieues

Après la visite de François Hollande à son chevet, Théo a lancé un appel au calme, appelant les manifestants à « cesser les hostilités ». Plusieurs quartiers de Seine-Saint-Denis ont en effet été le théâtre d’émeutes ces derniers jours, entraînant plusieurs arrestations.

Mercredi, les 17 personnes interpellées à Aulnay-sous-Bois lors de violences urbaines passaient en comparution immédiate devant le tribunal de Bobigny. Alors que les onze mineurs ont été placés sous le statut de « témoins assistés », cinq adultes ont été condamnés à des peines allant de six mois de prison avec sursis jusqu’à six mois de prison ferme, avec des aménagements de peine. Un sixième majeur a quant à lui été relaxé.

L’IGPN refuse l’idée d’un « viol délibéré »

Par ailleurs, l’enquête autour de l’interpellation de Théo suit son cours. La « police des polices », l’IGPN, a aujourd’hui écarté l’idée d’un « viol délibéré » à la suite du visionnage de nouvelles images de vidéosurveillance. Blessé notamment sur 10 centimètres au niveau du rectum suite à l’introduction d’une matraque, Théo s’est vu prescrire soixante jours d’incapacité de travail. Le gardien de la paix poursuivi pour viol réfute l’agression sexuelle et parle de « coup accidentel ». Les premières conclusions de l’IGPN, qui retiennent la thèse « d’une opération qui tourne mal », pourraient aboutir à la requalification des faits de « viol » en « violences volontaires », au même titre que les trois autres policiers concernés.

L’avocat de Théo, maître Éric Dupond-Moretti, précise que ces éléments « n’ont rien de nouveaux » et demande que « l’enquête [puisse] suivre son cours ».

À lire aussi : Le parquet efface le viol policier et Banlieues : à quoi joue la police ?

Société
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