Le cortège de tête face à la violence
Depuis le mouvement contre la loi travail jusqu’au 1er Mai dernier, une partie des manifestants font désormais front contre la police. La tension monte des deux côtés.
dans l’hebdo N° 1455 Acheter ce numéro

La violence grandit. À chaque nouvelle manifestation, des images de rues noyées sous les gaz lacrymogènes, des forces de l’ordre en rangs serrés derrière leurs boucliers transparents et des manifestants à la détermination sans faille devant le cortège syndical. Le 1er Mai dernier, les images du défilé traditionnel ont été éclipsées par une photo : celle d’un policier en flammes après le jet d’un cocktail Molotov qui l’a brûlé au visage et aux mains.
La viralité de l’image est immédiate, déclenchant une série de commentaires souvent indignés, solidaires, mais aussi parfois douteux. La section CGT de Publicis ose le sarcasme – déplacé – sur Twitter : « On ne parle que du poulet grillé sur les chaînes style BFM, mais pas beaucoup de ça [les violences policières]… » Des actes et des paroles sitôt condamnés par les pouvoirs publics. Était-ce un accident ? Les conséquences d’une violence volontaire ? L’événement a-t-il fait débat au sein du « cortège de tête », qui occupe le premier rang de toutes les manifestations depuis le mouvement contre la loi travail, au printemps dernier ?
Cette hydre du mouvement social semble concentrer aujourd’hui les espoirs de ceux qui ne croient plus au pouvoir d’action des manifestations « traditionnelles », « plan-plan » ou « camion mojito », comme les appelle Simon*, comédien et musicien de 34 ans, observateur de l’intérieur du cortège de tête. « Mojito, parce qu’il y a le côté un peu festif et anesthésiant de l’alcool dont on abreuverait les manifestants pour les ramollir et qu’ils arrivent complètement impuissants en fin de manif… » Le cortège de tête, c’est l’exact inverse : une tête qui grandit et où s’agglomèrent toutes sortes de gens quittant les rangs traditionnels pour s’y fondre,