Mathilde Panot, la voix des invisibles

Entrée en politique depuis peu, la jeune députée de la France insoumise est engagée depuis dix ans auprès des oubliés de la République.

Pauline Graulle  • 21 juin 2017 abonné·es
Mathilde Panot, la voix des invisibles
© photo : DR

Au sein du groupe de La France insoumise à l’Assemblée, Jean-Luc Mélenchon pourra compter sur la fidélité de cette jeune députée, à qui il a mis le pied à l’étrier de la politique. À 28 ans, Mathilde Panot ne l’a toutefois pas attendu pour mettre ses idées en acte. L’Orléanaise d’origine, passée par Sciences Po-Nancy (filière relations internationales) puis par Science Po-Paris, s’est engagée dès ses premières années d’études.

À 18 ans, elle devient bénévole à ATD Quart Monde et côtoie, pendant huit ans, la très grande précarité. Au contact des « militants » – l’appellation des bénéficiaires –, elle apprend que « ce qui fait le plus souffrir les gens qui n’ont rien, ce n’est pas le dénuement matériel, c’est la perte de leur citoyenneté ». Dans cette association, l’étudiante se forme à des dispositifs innovants : elle participe aux séances de « théâtre-forum » – inspirées du Théâtre des opprimés d’Augusto Boal –, monte des bibliothèques de rue et des universités populaires…

Repérée par Mélenchon, qu’elle rejoint en 2012, elle entre dans l’équipe de campagne du candidat en 2015. Au tout début de la France insoumise, en 2016, elle est chargée de coordonner le projet de la « caravane pour l’égalité des droits » dans les quartiers. Là encore, Mathilde Panot a de l’expérience à revendre : elle sort tout juste d’une mission associative à La Grande-Borne, à Grigny (91), où elle est devenue « spécialiste des punaises de lit », sourit-elle, avant de raconter les drames humains (séparation des familles, tentatives de suicide…) occasionnées par ces bestioles qui prolifèrent dans la cité délabrée.

Pendant tout un été, la caravanière sillonne les cités HLM de l’Hexagone. Avec d’autres insoumis, elle propose aux habitants, grâce à un simulateur, de comptabiliser les prestations sociales auxquelles ils ont droit mais qu’ils ne demandent pas forcément. Évoque au passage l’inscription sur les listes électorales. Des dizaines et des dizaines d’étapes, où Mathilde Panot côtoie, encore et toujours, la France invisible. La solitude des habitants et la bravoure de ces familles qui vivent avec 500 euros par mois la marquent plus encore que les couloirs lépreux ou les ascenseurs à ciel ouvert qu’elle découvre au gré des porte-à-porte.

Mobiliser les oubliés de la République : voilà ce qui explique, au moins en partie, le succès de sa campagne à Ivry-sur-Seine (94), où elle l’a emporté (à 52,2 %) contre la candidate LREM. Et aussi sa victoire surprise, au premier tour, sur Pascal Savoldelli, le « monsieur élections » du PCF, dans la ville de Maurice Thorez : « On n’a pas fait de la politique à l’ancienne. Pour moi, faire de la politique, c’est se mélanger à des gens qu’on ne rencontrerait pas ailleurs. »

On la devine aussi simple que brillante. Et bien loin de ses anciens camarades de l’école de la rue Saint-Guillaume, qui, dit-elle, « prône une politique tellement technocratisée que ça ne pousse pas à l’engagement ». Elle, veut se « faire entendre » à l’Assemblée, et rester solidement ancrée au sol. « Et si elle se met à planer, plaisante l’un de ses colocataires ivryens, on ira la chercher. »

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