Sclérose en plaques : le vaccin contre l’hépatite B mis en cause

La Cour de justice de l’UE a constaté des indices suffisamment forts pour établir un lien entre vaccin contre l’hépatite B et sclérose en plaques. Une décision inédite. Et une brèche juridique pour l’indemnisation des victimes d’accidents vaccinaux.

Maïa Courtois  • 26 juin 2017
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Sclérose en plaques : le vaccin contre l’hépatite B mis en cause
© PHOTO : AUBERT / BSIP

La Cour de justice de l’Union européenne a reconnu juridiquement, mercredi 21 juin, l’existence de liens entre le vaccin contre l’hépatite B et la sclérose en plaques : « proximité temporelle » entre l’administration du vaccin et la survenance de la maladie ; « absence d’antécédents médicaux de la personne » ; multiplicité de cas similaires répertoriés. Si elle n’invoque pas de preuve scientifique, la Cour reconnaît un «faisceau d’indices suffisants » pour ouvrir un droit à l’indemnisation des victimes.

C’est une première qui crée un précédent juridique majeur. « Jusqu’ici, pour les vaccins recommandés comme celui de l’hépatite B, les victimes devaient prouver la défectuosité du produit : autrement dit, c’était quasi impossible, précise Catherine Gaches, présidente du Revahb (Réseau vaccin hépatite B). Désormais, les avocats et victimes vont pouvoir s’appuyer sur une jurisprudence pour prétendre à une indemnisation. Et ce sera à un juge de décider, après étude du dossier individuel. » Une brèche juridique s’ouvre pour toutes les victimes d’un accident vaccinal : même si chaque cas fera l’objet d’une instruction particulière, il leur sera plus facile de porter leurs dossiers devant les juges nationaux.

« Il s’agit d’une sorte de “présomption de culpabilité”, en l’absence de tout consensus scientifique, explique Didier Lambert, président de l’association de victimes E3M qui milite pour des vaccins sans aluminium. Lorsque les alertes scientifiques autour d’un vaccin sont fortes, la réponse des autorités sanitaires devrait être de financer la recherche pour en savoir plus. Mais ce n’est pas le cas. Alors on se tourne vers la justice. La décision de la Cour de justice de l’UE permet en ce sens de dépasser une situation de blocage. » C’est le cas de W., vacciné contre l’hépatite B en 1998, diagnostiqué de la sclérose en plaques en 2000, et décédé par la suite, qui est à l’origine de la décision. Pour ses proches, le vaccin de Sanofi est responsable de sa maladie. Ils ont porté son dossier devant la cour d’appel de Versailles, puis devant la Cour de cassation, qui a finalement saisi la Cour de justice de l’UE.

Cette décision de la justice européenne pourrait-elle freiner Agnès Buzyn ? Le vaccin contre l’hépatite B fait partie des onze vaccinations que la ministre de la Santé souhaite rendre obligatoires en France. « Cela risque de ne rien changer au projet de loi de la ministre, complètement empreint de conflits d’intérêts. En revanche, elle vient renforcer la défiance des citoyens », résume Sébastien Barles, assistant de l’eurodéputée écologiste Michèle Rivasi sur les questions de santé.

À lire aussi >> Vaccins : « On ne peut pas restaurer la confiance en passant par l’obligation ! »

Les laboratoires pharmaceutiques restent protégés au niveau européen. Pour les vaccinations non obligatoires, c’est la directive européenne de 1985 sur les produits défectueux qui s’applique. Son article 7 exonère les laboratoires de leurs responsabilités, au nom du « risque de développement » – autrement dit, le fait que rien, au moment de la mise en circulation du produit, ne permettait de déceler l’existence du défaut. L’article 15 de cette directive autorise les États membres à maintenir la responsabilité du producteur… mais il est très rarement invoqué. La plupart du temps, la charge de l’indemnisation ne pèse pas sur le budget des laboratoires, mais sur les caisses de l’Oniam (Office national d’indemnisation des accidents médicaux). De l’argent public donc.

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