Stéphane Peu, artisan de l’unité

À 54 ans, l’adjoint PCF au maire de Saint-Denis a repris la 2e circonscription de Seine-Saint-Denis au PS en réussissant à faire l’union PCF-France insoumise.

Nadia Sweeny  • 21 juin 2017 abonné·es
Stéphane Peu, artisan de l’unité
© photo : DR

Fier d’être élu « par les grandes cités HLM », le candidat PCF-France insoumise, Stéphane Peu, a recueilli 58 % des voix face à Véronique Avril (LREM), au terme d’« un an de campagne ! », soufflait-il à l’avant-veille du vote. Devant le marché de Saint-Denis, l’adjoint au maire délégué au logement ne peut faire quelques pas sans être joyeusement alpagué. « Tout le monde le connaît ! », se réjouit Farid Aïd, son suppléant. En bon stratège, Stéphane Peu a choisi pour second cet élu Front de gauche (FG) de Pierrefitte, ville « talon d’Achille » électorale du PCF qui avait voté à 68,7 % pour le socialiste Mathieu Hanotin en 2012, contre Patrick Braouezec. Aujourd’hui, Stéphane Peu y obtient 55 % des voix. Un pied de nez au socialiste et peut-être aussi à Patrick Braouezec, ancien maire de Saint-Denis qui l’avait nommé adjoint au logement dès 1997, mais qui a appelé à voter Emmanuel Macron dès le premier tour de la présidentielle.

Inquiet de l’absence d’un ministère du Logement « pour la première fois depuis la guerre », Peu est passionné par cette question extrêmement sensible sur son territoire. L’artisan et président de Plaine Commune Habitat – regroupement des offices HLM de neuf communes de Seine-Saint-Denis – est réputé pour être « l’un des plus pointus en Île-de-France sur la question du logement ». « Travailleur », « perfectionniste », « déterminé », « qui ne laisse rien au hasard », ce Breton d’origine, biberonné au PCF dès l’âge de 16 ans, est un iconoclaste qui n’hésite pas à défier la ligne de son parti. Dès 1985, peu après son arrivée à la direction nationale des Jeunes Communistes, en charge des relations internationales, il ne cache pas son engouement pour Gorbatchev au moment où le PCF y est hostile. Au congrès de 1989, en pleine manifestation de Tiananmen, il fustige au micro la présence des représentants du pouvoir chinois. Il y laissera son poste. « Le parti a souvent été à contretemps de l’histoire », avoue celui qui deviendra secrétaire général du mouvement « refondation » de 1991 à 1995, prônant l’unité avec la gauche du PS.

Stéphane Peu n’a pas froid aux yeux. Il parle sans pudeur de ses « 3 300 euros de salaire mensuel » et sait humer l’air du temps et saisir la balle au bond. « Alain Krivine [figure de la LCR, NDLR] était mon voisin de palier : il m’a présenté le maire de Porto Alegre. On a bien accroché, dit ce bon vivant pour expliquer sa présence au comité d’organisation du premier Forum social mondial (2001). Du coup, on a organisé le second Forum social européen à Saint-Denis » (2003). Il a été l’un des premiers élus communistes à appeler au ralliement à Jean-Luc Mélenchon pour la présidentielle ?

Investi en avril 2016 par les sections locales PCF, Stéphane Peu entre tôt en campagne. Son slogan, « la gauche debout » est décidé au moment de l’émergence de Nuit debout. Il y ajoutera la mention « et insoumise » après avoir réussi le petit exploit de l’union qui, pourtant, capote au niveau national. « Je suis allé tout de suite à la rencontre du groupe local FI, puis nous avons discuté au niveau national », se souvient l’élu, qui obtient une « entorse » à la charte : « Le fléchage financier direct » vers son parti, réussissant à « naviguer dans les eaux troubles des négociations avec la France insoumise », selon un élu de Saint-Denis. Stéphane Peu l’emporte avec un bémol : une abstention qui culmine à 70,5 %.

Pour aller plus loin…

À l’Assemblée, Sébastien Lecornu dit merci aux socialistes
Analyse 16 octobre 2025 abonné·es

À l’Assemblée, Sébastien Lecornu dit merci aux socialistes

Le premier ministre échappe aux censures. Chez les socialistes, la fronde n’a pas vraiment eu lieu. Et la gauche se retrouve écartelée entre deux pôles. 
Par Lucas Sarafian et June Geffroy
« Censurer cette semaine est sans doute la dernière occasion d’obtenir une dissolution avant 2027 »
Politique 15 octobre 2025

« Censurer cette semaine est sans doute la dernière occasion d’obtenir une dissolution avant 2027 »

Après le discours de politique générale de Sébastien Lecornu et l’annonce de la non-censure par le PS, Rémi Lefebvre, politologue, professeur à l’université de Lille et à Sciences Po Lille, est l’invité de « La Midinale ».
Par Pablo Pillaud-Vivien
Taxe sur les holdings : Lecornu épargne les milliardaires
Économie 15 octobre 2025 abonné·es

Taxe sur les holdings : Lecornu épargne les milliardaires

Lors de son discours de politique générale, Sébastien Lecornu a affirmé avoir entendu le désir, au sein de la population, d’une meilleure justice fiscale reconnaissant même une « anomalie » au sein de la fiscalité des plus fortunés. Sa réponse : une taxe sur les holdings qui ne répondra absolument pas au problème.
Par William Jean et Pierre Jequier-Zalc
À l’Assemblée, Sébastien Lecornu gagne du temps grâce aux socialistes
Reportage 14 octobre 2025 abonné·es

À l’Assemblée, Sébastien Lecornu gagne du temps grâce aux socialistes

Dans un discours de politique générale express, le premier ministre renonce au 49.3 et suspend la réforme des retraites. Rien de plus. Mais suffisant pour que les socialistes ne le censurent pas immédiatement.
Par Lucas Sarafian