Pour l’ONU, Bachar al-Assad a fait usage de gaz sarin sur le peuple syrien

Un rapport d’experts des Nations unies, publié jeudi, accuse de nouveau le dictateur de Damas d’avoir utilisé des armes chimiques sur Khan Cheikhoun, le 4 avril dernier.

Politis.fr  et  AFP  • 27 octobre 2017
Partager :
Pour l’ONU, Bachar al-Assad a fait usage de gaz sarin sur le peuple syrien
© photo : ABDUSSAMED DAGUL / ANADOLU AGENCY

Un rapport de l’ONU a désigné jeudi le régime syrien du président Bachar al-Assad comme responsable de l’attaque meurtrière au gaz sarin sur la localité de Khan Cheikhoun, en Syrie. Le groupe d’experts est « convaincu que la République arabe syrienne est responsable de l’usage de sarin sur Khan Cheikhoun le 4 avril 2017 », est-il écrit dans ce rapport consulté par l’AFP.

Le rapport a conclu que le régime de Damas est bien responsable de l’attaque. Les éléments rassemblés vont dans le sens du « scénario le plus probable » selon lequel « le gaz sarin a été le résultat d’une bombe larguée par un avion », affirme le rapport, « certain que le responsable de cette attaque sur Khan Cheikhoun est le régime syrien ». Ce qui ne faisait guère de doutes puisque aucun autre acteur au conflit dispose d’avions de type Soukhoï comme ceux qui équipent l’aviation syrienne.

L’attaque sur cette ville de la province d’Idleb, alors contrôlée par des rebelles et des jihadistes, a fait 83 morts selon l’ONU, au moins 87 dont plus de 30 enfants selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Les États-Unis, la France et le Royaume-Uni avaient accusé les forces du président syrien Bachar al-Assad d’être responsables de cette attaque, mais Damas avait démenti toute implication. Début septembre, la commission d’enquête de l’ONU sur la situation des droits de l’homme en Syrie avait déjà estimé que les forces syriennes étaient responsables de cette attaque au gaz sarin.

En août 2013, le régime s’était déjà rendu coupable d’attaques au gaz contre la population de La Ghouta, dans la banlieue de Damas (2000 morts).

Nouveau cycle de pourparlers le 28 novembre

Human Rights Watch (HRW) a réclamé ce matin, à la suite de ce rapport, des sanctions contre les responsables d’attaques chimiques en Syrie : « Le Conseil de sécurité devrait agir rapidement pour assurer que des comptes soient rendus, en imposant des sanctions contre les individus et entités responsables d’attaques chimiques en Syrie. »

Sans surprise, la diplomatie russe a réagi en accusant le rapport de l’Onu de montrer « de nombreuses contradictions, des incohérences logiques, une utilisation de témoignages douteux et de preuves non confirmées ».

À l’inverse, l’ambassadrice des États-Unis aux Nations unies, Nikki Haley, a estimé que « le Conseil de sécurité doit envoyer un message clair : aucun usage d’arme chimique ne sera toléré et il faut apporter un soutien total aux enquêteurs indépendants ». Rappelons que dans la nuit du 6 au 7 avril 2017, Trump avait fait bombarder la base aérienne d’Al-Chaayrate d’où avait décollé le Soukhoï syrien.

Un peu avant la publication du rapport, le secrétaire d’État (ministre des Affaires étrangères) américain Rex Tillerson avait déjà déclaré : « Nous ne pensons pas qu’il y ait un avenir pour le régime Assad et la famille Assad. […] Le règne de la famille Assad arrive à sa fin, la seule question qui reste est de savoir comment cela sera provoqué », a-t-il poursuivi devant des journalistes à Genève, où il a rencontré l’émissaire des Nations unies pour la Syrie, Staffan de Mistura.

Ce dernier a indiqué qu’un nouveau cycle de pourparlers sur la Syrie se tiendrait à partir du 28 novembre à Genève, sous l’égide de l’ONU. « Nous devons engager les parties [au conflit] dans de vraies négociations », a déclaré le diplomate suédo-italien, qui a vu son annonce de recherche de solution pacifique occultée par les déclarations de Rex Tillerson, avec qui il s’était pourtant entretenu dans la journée.

Staffan de Mistura a déjà organisé sept sessions de discussions entre le régime syrien et l’opposition. Jamais il n’a réussi à surmonter le principal obstacle, qui concerne le sort du président Bachar al-Assad. Ce nouveau rapport accablant changera-t-il la donne ?

Monde
Temps de lecture : 3 minutes
Soutenez Politis, faites un don.

Chaque jour, Politis donne une voix à celles et ceux qui ne l’ont pas, pour favoriser des prises de conscience politiques et le débat d’idées, par ses enquêtes, reportages et analyses. Parce que chez Politis, on pense que l’émancipation de chacun·e et la vitalité de notre démocratie dépendent (aussi) d’une information libre et indépendante.

Faire Un Don

Pour aller plus loin…

Aux États-Unis, « une esthétique de la peur au cœur de la médiatisation des expulsions »
Donald Trump 20 octobre 2025 abonné·es

Aux États-Unis, « une esthétique de la peur au cœur de la médiatisation des expulsions »

Chercheur spécialiste des expulsions forcées, WIlliam Walters décrypte la façon dont l’administration Trump organise sa politique migratoire. Il explique également comment la communication autour de ces pratiques violentes est présentée comme un « spectacle » pour le public américain.
Par Pauline Migevant
Comment Trump et les Gafam empêchent la résistance contre les expulsions forcées
Expulsion 20 octobre 2025 abonné·es

Comment Trump et les Gafam empêchent la résistance contre les expulsions forcées

L’application ICEBlock, qui permettait d’anticiper les raids des forces spéciales anti-immigration, a été fermée par Apple, en accord avec Donald Trump. Politis donne la parole à son développeur, en colère contre la trahison du géant américain.
Par Sarah Laurent
Budget record pour l’ICE : Trump déploie sa machine anti-immigration
Décryptage 20 octobre 2025

Budget record pour l’ICE : Trump déploie sa machine anti-immigration

Avec plus de 120 milliards de dollars prévus d’ici à 2029, l’agence de l’immigration américaine connaît une expansion sans précédent. Centres de détention, recrutements massifs et expulsions à la chaîne deviennent les piliers du programme Trump.
Par Maxime Sirvins
Gen Z : l’internationale contestataire
Monde 17 octobre 2025 abonné·es

Gen Z : l’internationale contestataire

Comme en 1968, une jeunesse mondiale se lève à nouveau, connectée, inventive et révoltée. De Rabat à Katmandou, de Lima à Manille, la « Gen Z » exprime sa colère contre la corruption, les inégalités et la destruction de l’environnement.
Par Olivier Doubre