Susan Meiselas : Regard humaniste

Le Jeu de paume présente une rétrospective de la photographe américaine Susan Meiselas.

Jean-Claude Renard  • 21 février 2018 abonné·es

Des hommes cagoulés et armés, aux aguets, retranchés derrière des sacs de sable, dans l’attente d’une riposte de la Garde nationale, au Nicaragua, en 1978 ; une jeune femme anéantie et démunie, dans les décombres de sa maison ; une fouille de civils par des militaires ; un guérillero muni d’un fusil, s’apprêtant à lancer un cocktail Molotov. Née en 1948, à Baltimore, Susan Meiselas a tout juste 30 ans quand elle décide de couvrir l’insurrection populaire déclenchée après l’assassinat d’un directeur de journal d’opposition. Elle est alors l’une des rares photojournalistes à documenter la révolution sandiniste nicaraguayenne, au plus près de son sujet, suivant les principes de Robert Capa.

C’est l’un des enseignements de cette imposante et première rétrospective que lui consacre le Jeu de paume, à Paris. Près de dix ans plus tard, elle se rend au Kurdistan, fixant la mémoire kurde. Mais Susan Meiselas n’a pas toujours couru aux basques des conflits. Son travail s’ouvre au tout début des années 1970, du côté de l’intime, quand elle cadre les locataires de sa pension d’étudiante, ou des habitants au seuil de leur porte, une communauté versée dans le textile sur plusieurs générations, les strip-teaseuses d’un spectacle de fête foraine, puis les jeunes filles de Little Italy, à New York, saisies sobrement sur plusieurs années, livrant ainsi une forme de chronique photographique. Idem ses travaux sur la violence domestique, suivant une brigade policière (façon Weegee, mais sans la spectacularisation de son aîné) ; thématique reprise en 2015. C’est une constante dans l’œuvre de Meiselas : documenter sur le long cours, quitte à revenir sur les lieux, reprendre le sujet, archiver pour mieux observer la valeur des images dans le temps, entre la photo, le texte, la vidéo et les collages. Comme s’il fallait revenir cent fois sur l’ouvrage.

Susan Meiselas, Jeu de paume, Paris VIIIe, jusqu’au 20 mai.

Culture
Temps de lecture : 2 minutes

Pour aller plus loin…

Du gaz dans les bulles : l’édition BD alternative en péril
BD 19 septembre 2025 abonné·es

Du gaz dans les bulles : l’édition BD alternative en péril

Trente-cinq ans après leur émergence, les maisons d’édition indépendantes de bande dessinée traversent une grave crise économique au sein d’un marché en surproduction, frappé par une baisse généralisée du temps de lecture. À l’occasion du festival parisien Formula Bula, Politis donne la parole aux « indés » de la BD.
Par Marius Jouanny
Sepideh Farsi : «  Il était important pour Fatma Hassona d’apparaître digne »
Entretien 17 septembre 2025 abonné·es

Sepideh Farsi : «  Il était important pour Fatma Hassona d’apparaître digne »

À Cannes, Put Your Soul on Your Hand and Walk était porté par sa réalisatrice, mais pas par la jeune Gazaouie qui en est le cœur, reportrice photographe assassinée quelques semaines plus tôt. Nous avons rencontré la cinéaste pour parler de la disparue, de son film et de l’Iran, son pays natal.
Par Christophe Kantcheff
Aux Frigos, l’amertume des artistes menacés d’expulsion par la Mairie de Paris
Reportage 16 septembre 2025 abonné·es

Aux Frigos, l’amertume des artistes menacés d’expulsion par la Mairie de Paris

Dans ce lieu culturel du 13e arrondissement de Paris, un collectif d’artistes qui ne parviennent plus à payer leur loyer, lutte pour empêcher leur expulsion par la ville. S’ils croient peu dans les recours, ils espèrent « que ce lieu ne meure pas sans aucun bruit ».
Par Pauline Migevant
« L’Intérêt d’Adam », la force de l’empathie
Cinéma 16 septembre 2025 abonné·es

« L’Intérêt d’Adam », la force de l’empathie

Laura Wandel met en scène une infirmière-courage à l’hôpital.
Par Christophe Kantcheff