Le Front national en quête d’alliances

Le FN a multiplié les appels du pied en direction de la droite, dont elle veut attirer électeurs et militants.

Michel Soudais  • 14 mars 2018 abonné·es
Le Front national en quête d’alliances
Chaudement applaudi, Steve Bannon a conseillé de se laisser « traiter de racistes, xénophobes, islamophobes, homophobes ».
© Philippe Huguen / AFP

Marine Le Pen envisage désormais de « mettre en œuvre des alliances ». Le mot était jusqu’ici étranger à la culture d’un parti qui s’est toujours construit contre tous les autres. Quand Bruno Mégret, numéro deux du FN, avait osé en envisager, la réprobation du clan Le Pen avait été totale. Vingt ans plus tard, Marine Le Pen, qui instruisait contre lui un procès en trahison, explique à ses troupes qu’avec le « mode de scrutin à deux tours » sur lequel repose la Ve République « gagner sans alliance est ardu ». Comme ils ont pu le voir aux régionales, où, bien qu’arrivé largement en tête au premier tour en Paca et dans les Hauts-de-France, le FN a échoué à rassembler une majorité au second tour. Cet échec justifie, aux yeux de la présidente du FN, de changer le nom de son parti pour un nom qui exprime sa « volonté de rassemblement ». Et de s’ouvrir à des ententes : « La culture de l’alliance, c’est la capacité de décider de compromis (et non de compromissions), […] c’est la faculté de respecter l’autonomie de ses partenaires, […] c’est l’aptitude à intégrer les ralliés et à respecter ses alliés, leurs parcours, leurs identités propres, leurs sensibilités. »

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Aux européennes de 2019, le FN n’exclut pas une alliance avec des formations comme Debout la France, le Centre national des indépendants et paysans ou des personnalités, et décider avec elles qui conduira la liste. Thierry Mariani figure parmi les noms cités. Dimanche, dans les couloirs de leur congrès, les dirigeants du FN se félicitaient de son plaidoyer, dans Le JDD, pour un « rapprochement » avec le FN. Constatant que Les Républicains « n’ont plus d’alliés » après le rapprochement des centristes avec Macron, l’ex-ministre LR des Transports de Nicolas Sarkozy, battu aux législatives, estime que « le FN a évolué » et qu’il faut regarder « si un accord ou un rapprochement sont possibles ». « Sans alliés, nous allons rester dans l’opposition pour longtemps […], argue-t-il. Si on veut des alliés, ils seront forcément de ce côté-là si on veut appliquer un programme de droite. »

Selon lui, « beaucoup de militants » LR font le même constat, désavoué toutefois par les responsables des Républicains qui ont martelé lundi qu’aucune alliance n’est envisageable avec le FN. Toutes les enquêtes d’opinion montrent toutefois une grande porosité des idées entre leurs électorats sur la défense des valeurs traditionnelles, l’immigration, l’islam ou les questions sécuritaires. Et si des divergences existent sur les questions économiques ou l’Europe, le FN a commencé ce week-end à les atténuer. Tirant les leçons de la présidentielle, plusieurs responsables frontistes croisés ce week-end estiment que le terreau des électeurs de gauche déçus, que le FN draguait depuis 2012 avec le « discours social » de Florian Philippot, s’est tari avec la percée de Jean-Luc Mélenchon et la France insoumise. C’est désormais l’électorat de droite qu’ils veulent attirer. L’offre d’alliances faite ce week-end ouvre en fait une compétition avec le parti de Laurent Wauquiez.

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