Pionniers de la sylviculture douce
Dans le Morvan, un groupement forestier démontre qu’il existe une alternative crédible et rentable à l’exploitation intensive de la forêt, qui malmène les sols et les paysages.
dans l’hebdo N° 1513-1515 Acheter ce numéro

C’est un bois touffu, d’apparence ordinaire, au bord d’une petite route goudronnée, qui noue la gorge de Lucienne Haese. Cette femme bouillonnante au verbe précis est soudain saisie d’émotion devant la beauté de cette forêt vivante – miracle simple de la nature qui travaille. Elle est emplie de fierté, surtout, de voir ce qu’a accompli le Groupement forestier pour la sauvegarde des feuillus du Morvan, dont elle est la figure de proue : exploiter cette parcelle de forêt sans en compromettre l’attrait touristique ni la richesse écologique.
Pour apprécier la splendeur de ce bout de forêt et des 300 hectares que le groupement possède et exploite, il faut d’abord emprunter une route qui serpente entre les collines du Morvan (Bourgogne) et rouler un moment pour voir l’autre sylviculture : celle qui coupe des forêts de feuillus à ras pour planter des rangées de résineux. Qui partage le panorama en tronçons à l’équerre, déclinant autant de nuances de vert selon l’âge des arbres. Et qui épargne encore l’horizon proche des 40 000 habitants d’Autun, la sous-préfecture de Saône-et-Loire, au grand soulagement de ces derniers.
La voiture s’arrête en lisière d’une de ces coupes rases qui transforment une forêt séculaire en un champ de rien en proie à l’érosion. Les souches éventrées cohabitent avec des jeunes pousses de pin au garde-à-vous, prêtes à décrocher les cieux. À quelques dizaines de mètres de ce champ de labour, une