Les sportifs refusent d’être mis KO

Avec un budget en baisse, le gouvernement veut imposer une réduction drastique de moyens.

Erwan Manac'h  • 26 septembre 2018 abonné·es
Les sportifs refusent d’être mis KO
© photo : JEAN-PAUL PELISSIER/POOL/AFP

Le mouvement sportif français s’expose à de sérieuses déconvenues. Avec un budget en baisse de 6 % en 2019 après déjà 7 % de baisse en 2018, le gouvernement veut imposer une réduction de moitié, d’ici à 2022, dans l’effectif de 3 500 conseillers techniques sportifs, les experts qui forment les entraîneurs.

Uppercut un peu dur à encaisser, après deux années de baisse des emplois aidés qui ont fragilisé le mouvement associatif dans son ensemble : 25 000 associations ont mis la clé sous la porte en 2017, selon une étude du réseau Recherches et Solidarités. Un chiffre pour la première fois supérieur au nombre de créations.

Ce tacle à la carotide est en réalité destiné, dixit la communication gouvernementale, à préparer la mise en place d’une nouvelle « agence du sport » début 2019. Elle doit coiffer la politique publique envers les fédérations sportives et « évoluera dans un cadre désormais partenarial avec l’ensemble des financeurs […], monde économique inclus ». Traduction : on privatise le sport de haut niveau.

La parade est venue le 21 septembre du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), qui, s’excusant de ne pas « être la CGT » et de ne pas « savoir bloquer le périph », a néanmoins soigneusement plombé l’ambiance de la « fête du sport », en lançant une pétition pour « demander que le sport bénéficie de moyens à hauteur de ses apports humains, économiques et sociétaux ». Missive timidement relayée par les sportifs (hormis le judoka Teddy Riner ou le nouveau recordman du monde du décathlon Kevin Mayer), qui a néanmoins fait grand bruit et recueilli en un week-end 160 000 signatures.

Le CNOSF n’est pas opposé à la création d’une agence nationale pour le sport, mais réclame 400 millions d’euros de budget pour fonctionner. Le gouvernement envisage environ deux fois moins. « Le sport, en France, c’est 17 millions de licenciés et 3,5 millions de bénévoles. C’est donc le plus important mouvement social dans ce pays », pointe Bernard Amsalem, vice-président du CNOSF, dans une interview à Alternatives économiques, regrettant que les experts de CAP22, inspirateurs de cette réforme, soient « des gens hors-sol qui n’ont pas la culture du sport et qui sont des gestionnaires à court terme ». Ces annonces budgétaires tombent au plus mal, à six ans des JO de Paris et alors que les 15 000 clubs de foot amateur français s’attendent à une hausse de l’ordre de 10 % du nombre de licenciés, depuis l’épopée victorieuse des Bleus en Russie. En 1998, déjà, près de 180 000 Zizou en culottes courtes avaient pris d’assaut les terrains.

Société
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