Coquillages à l’étouffée
Les ostréiculteurs de l’étang de Thau ont du mal à faire le lien entre changement climatique et pollution de leur zone de travail.
dans l’hebdo N° 1529 Acheter ce numéro

© Luc OLIVIER/AFP
D’un côté la Méditerranée, de l’autre l’étang de Thau. Au milieu, le lido reliant Sète et Marseillan, frontière naturelle entre l’eau douce et l’eau salée. Ce cordon sableux aménagé de douze kilomètres invite à s’engouffrer dans les interstices routiers pour découvrir les mas conchylicoles disséminés autour de la lagune vedette de l’Hérault. En ce mois de novembre, l’air marin souffle, les oiseaux migrateurs survolent les vignes roussies par la chaleur de l’été, particulièrement ardente. Pendant huit jours consécutifs, la température de l’eau du bassin de Thau a stagné à 29,5 °C, provoquant un épisode sévère de malaïgue, « mauvaises eaux » en occitan. Un été meurtrier pour les coquillages de Thau : 2 700 tonnes d’huîtres détruites (un tiers de la production annuelle) et 1 200 tonnes de moules (100 % de l’élevage). Aujourd’hui, 15 % de la production française d’huîtres provient de l’étang de Thau.
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La plupart des médias ont titré sur l’impact dévastateur du réchauffement climatique, mais la réalité est plus complexe que cela, à l’image de cet écosystème lagunaire aussi riche que fragile. Car la malaïgue est d’abord « une réaction chimique naturelle », s’empresse de rappeler chaque scientifique ou ostréiculteur interrogé. « Plus la température augmente, plus le métabolisme des animaux au sang froid comme les huîtres s’accélère soutenant leur croissance et induisant leur reproduction. Les huîtres consomment donc plus d’oxygène. Mais en parallèle, la lagune stocke moins ce précieux oxygène à cause de la chaleur qui diminue la solubilité des gaz dans l’eau. En l’absence de vent, cela peut provoquer un dysfonctionnement