Dans le corps du texte

Atypique, le festival Concordan(s)e présente des créations élaborées et interprétées en duo par des chorégraphes et des écrivains.

Jérôme Provençal  • 27 mars 2019 abonné·es
Dans le corps du texte
© photo : Pleg 92’, duo à tonalité burlesque du chorégraphe Philippe Lafeuille et de l’écrivaine Elitza Gueorguieva.crédit : Fanny Adler

Dans la jungle de plus en plus touffue des festivals de danse, Concordan(s) e – créé en 2007 et dirigé par Jean-François Munnier – se distingue par l’originalité de son principe. Celui-ci consiste à faire se rencontrer un écrivain ou une écrivaine et un ou une chorégraphe (ne se connaissant pas au préalable), afin qu’ils conçoivent et interprètent ensemble une pièce de danse avec texte d’environ 30 minutes. Chaque année, plusieurs créations prennent ainsi forme et sont présentées dans divers lieux pendant plusieurs semaines. Itinérant, le festival se déroule majoritairement en Île-de-France et se déplace pour quelques dates dans d’autres régions.

Ayant démarré le 16 mars et se poursuivant jusqu’au 27 avril, l’édition 2019 – dont le cœur se situe début avril – propose quatre créations inédites, auxquelles s’ajoutent les reprises de trois pièces créées lors d’éditions précédentes. Parmi les nouvelles créations figure notamment L&L. Façonnée en duo par l’écrivaine française Camille Laurens et Joanne Leighton, chorégraphe belge d’origine australienne installée en France depuis plusieurs années, la pièce s’articule autour de la marche et de la répétition.

« De manière générale, j’aime bien tenter de nouvelles choses, explique la romancière Camille Laurens. J’ai déjà collaboré avec des chorégraphes par le passé, mais seulement en écrivant des textes. Ce qui m’a plu dans le projet de Concordan(s)e, c’est l’idée de mettre mon corps en jeu, de m’engager physiquement dans la danse. J’ai la sensation d’éprouver réellement la dimension organique du texte. Être ainsi sur scène constitue un vrai défi, d’autant que Joanne et moi dansons le plus possible en synchronisation, ce qui augmente encore la difficulté. Nous sommes très à l’écoute l’une de l’autre dans la pièce, qui procède vraiment d’une “concordance” entre son univers artistique et le mien. »

La pièce Xamûma fane lay dëm (Je ne sais pas où je vais) résulte quant à elle de la rencontre entre le jeune chorégraphe d’origine sénégalaise Amala Dianor et l’écrivain Denis Lachaud (1), également acteur et metteur en scène. « Le processus de rencontre est ce qui fonde avant tout ma démarche artistique, déclare Amala Dianor. Aller à la rencontre d’un auteur me stimule particulièrement, avec le défi de devoir dire du texte sur scène. Cela étant, il y a beaucoup de mouvement(s) dans la pièce. Les arts martiaux, dont nous sommes fans tous les deux, nous ont permis de trouver un espace commun. Denis fait du karaté depuis des années, il m’a montré des katas [enchaînements de mouvements et de postures du karaté, NDLR] et j’ai composé une partition chorégraphique à partir de cela, le texte intervenant assez tard dans la pièce. »

Sont également au programme Je suis un centre, exploration du fait de devenir mère, ou de naître fille, menée par la chorégraphe Catherine Dreyfus et l’écrivaine Catherine Grive, et Pleg 92’, duo autofictif à tonalité burlesque réunissant le chorégraphe Philippe Lafeuille et l’écrivaine Elitza Gueorguieva.

Festival Concordan(s)e, jusqu’au 27 avril, programme complet sur www.concordanse.com

(1) Dont vient de paraître un roman chez Actes Sud, Les Métèques.

Spectacle vivant
Temps de lecture : 3 minutes