Islamophobie made in France

L’islamophobie, ce racisme qu’on cache bien commodément sous le mot de « laïcité », s’expose plus que jamais au grand jour.

Agathe Mercante  • 16 octobre 2019 abonné·es
Islamophobie made in France
© photo : L’interpellation par un élu frontiste d’ume mère voilée au conseil régional de Franche-Comté, le 11 octobre, avait provoqué les larmes du fils de celle-ci. crédit : DR

On ne sait jamais quand et comment ces choses-là commencent. L’islamophobie, ce racisme qu’on cache bien commodément sous le mot de « laïcité », s’expose plus que jamais au grand jour. Vendredi 11 octobre, une femme voilée accompagnant une sortie scolaire au conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté a été violemment prise à partie par le frontiste Julien Odoul. « Nous sommes dans un bâtiment public […], madame a tout le loisir de garder son voile chez elle, dans la rue, mais pas ici ! », a-t-il attaqué. Les images ont choqué, mais pas au point d’alerter les esprits et les consciences sur leur gravité. Le lundi, le tout frais émoulu président des Républicains, Christian Jacob, interpelé sur France Inter par un auditeur qui lui reprochait de n’avoir, « à aucun moment, fait référence à la loi qui autorise les mamans voilées à accompagner les enfants en sortie scolaire », s’est réfugié, mal à l’aise, derrière l’« ambiguïté de la loi ». Bien sûr, c’est la loi qui est ambiguë, pas les discours xénophobes qu’on nous sert depuis des décennies !

Qu’il est facile de se réfugier derrière les sorties scolaires, le port de signes ostentatoires, ou le terrorisme pour cacher son islamophobie et son racisme ! En témoigne la réaction du ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, qui estime que « le voile, en soit, n’est pas souhaitable dans notre société […], ce qu’il dit n’est pas conforme à nos valeurs ». De quelles « valeurs » parle-t-on exactement ? De fermer ses ports à l’Aquarius ? D’engager un débat sur l’immigration ? Ou de faire de chaque citoyen un indic ? L’injonction d’Emmanuel Macron, lors de son hommage aux policiers tués de la préfecture de Paris, à une « société de vigilance » pour « venir à bout de l’hydre islamiste » est claire. Et les médias de gloser ad nauseam sur ce qu’il faudrait signaler. « Quand vous avez des individus qui ont une barbe signifiante, ça peut alerter », pointait ainsi l’inénarrable Pascal Praud sur CNews.

Plus complète, une note maladroitement transmise aux personnels de l’université de Cergy-Pontoise, liste les prétendus signaux de radicalisation des étudiants : arrêt de l’alcool, arrêt de manger du porc, arrêt de faire la fête… Il s’agit bien de « surveiller » pour ensuite « alerter ». Ou plutôt « dénoncer » : le musulman, le migrant, la femme, le manifestant… Remercions donc Guy Joao, le faux Xavier Dupont de Ligonnès, qui en occupant le devant de la scène ce week-end, a mis un temps en sourdine ce flot continu d’immondices déjà beaucoup trop vu, lu et entendu.

Politique
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