Voile : « Ces polémiques alimentent un racisme »
Loin des arguments invoqués de féminisme et de laïcité, les controverses autour du voile islamique illustrent un refus de la visibilité de l’islam dans l’espace public français, selon Hourya Bentouhami.
dans l’hebdo N° 1576 Acheter ce numéro

Maîtresse de conférence en philosophie à l’université Jean-Jaurès de Toulouse et membre de l’Institut universitaire de France, Hourya Bentouhami s’inquiète des conséquences possibles de la multiplication des débats sur le voile islamique. Car celle-ci, dit-elle, alimente l’idée dangereuse d’une incompatibilité entre l’islam et la République.
De quand datent les premières polémiques autour du foulard islamique en France ?
Hourya Bentouhami : On fait souvent remonter le début de ces polémiques à l’affaire du collège de Creil (1). Mais, en réalité, cette question de la France et du foulard islamique a une chronologie beaucoup plus lointaine. À l’époque coloniale, le dévoilement des femmes musulmanes était déjà au centre des politiques de « civilisation » . Cette injonction à ôter le foulard – notamment lors de « cérémonies de dévoilement » organisées – était une forme de domination coloniale des mœurs, suivant cette idée qu’en se dévoilant ces femmes montreraient un désaveu de leur culture d’origine, alimentant ainsi une démoralisation des familles musulmanes favorisant l’occupant. Plus tard, il y a eu une importation de cette question du voile sur le territoire français, du fait des migrations post-coloniales. La scène devient dès lors celle de la métropole. Ce sont les affaires de Creil et celles qui ont suivi. Puis il y a un tournant en 2004 avec la loi sur les signes religieux à l’école, qui devait, nous assurait-on, clore les débats autour du foulard. Mais, loin de les