Uber et mafia

« La Nuit venue » est un premier film noir très prometteur.

Christophe Kantcheff  • 15 juillet 2020 abonné·es
Uber et mafia
© Jour2fete

Après Loach, après Guédiguian, l’ubérisation de la société continue d’être un thème central de cinéma. C’est au tour de Frédéric Farrucci, pour son premier long-métrage très prometteur, La Nuit venue, de raconter l’histoire de Jin (Guang Huo), un chauffeur de VTC. Un boulot qui permet toutes les exploitations : Jin est un jeune Chinois sans papiers à Paris, endetté jusqu’au cou (le prix de son émigration) auprès du personnage mafieux qui est à la tête de cette société de VTC. Celui-ci tient ses « employés » sous la férule de ses hommes de main et les rackette en instaurant la terreur.

La Nuit venue est un film noir qui en respecte scrupuleusement les codes. Très peu de scènes de jour, un décor urbain, une plongée dans un milieu sans scrupule, un personnage principal qui souhaite s’en sortir et la rencontre avec une jeune femme, Naomi (Camélia Jordana), elle-même évoluant dans les « bas-fonds » : elle est strip-teaseuse dans une boîte de nuit et call-girl.

On s’attache au personnage de Jin parce que celui-ci n’est pas qu’une victime. Il tente d’instaurer de l’entraide là où chacun cherche à sauver sa peau. Il envoie de l’argent à sa mère, avec qui il parle par Skype. Et il compose de la musique électronique, lui qui à Pékin était DJ (Rone signe la bande originale du film). Il rêve de pouvoir retrouver sa liberté pour vivre de ses talents.

Frédéric Farrucci insuffle un ton personnel à ce film rude et sensuel, qui refuse la facilité – une bonne part du film est en chinois, les scènes entre Jin et Naomi jouent sur la « poésie » nocturne et la suggestion. Ce film, globalement sombre, donne une bonne idée des aliénations peu visibles qui nous entourent. Pour autant, il ne manque vraiment pas de charme.

La Nuit venue, Frédéric Farrucci, 1 h 35.

Cinéma
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